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8.11.2021

[Grand Forum Agencement & Contract] Le contract à l’heure des modèles alternatifs

La deuxième journée du Grand Forum Agencement & Contract de l’Ameublement français, qui a eu lieu dans ses locaux parisiens les 19 et 20 octobre, a mis en évidence les nouvelles thématiques qui commencent à impacter les projets notamment hôteliers, comme l’économie de la fonctionnalité et la location de mobilier, avec à la clé une création de valeur possible pour les fabricants grâce aux services. L’événement a aussi permis de présenter les 6 lauréats du palmarès Contract 2021, qui met en valeur les savoir-faire d’excellence des entreprises françaises.

Après avoir fortement pénalisé tout le secteur du contract – hôtellerie, restauration, bureaux – les confinements successifs, depuis la crise de la Covid-19, pourraient aussi marquer un tournant et accélérer la mutation de ces différents profils d’établissements. Sous la poussée du développement durable, la volonté de consommer autrement et de mutualiser certains biens et services s’exprime dans la montée de « l’économie de la fonctionnalité », l’un des premiers thèmes qui ont été traités dans la matinée du 20 octobre. De quoi s’agit-il ? Selon la définition de l’Ademe, « L’économie de la fonctionnalité consiste à fournir aux entreprises, individus ou territoires, des solutions intégrées de services et de biens reposant sur la vente d’une performance d’usage ou d’un usage, et non sur la simple vente de biens. Ces solutions doivent permettre une moindre consommation de ressources naturelles, dans une perspective d’économie circulaire, un accroissement du bien-être des personnes, et un développement économique. » Comme l’a expliqué Géraldine Hue, du cabinet de conseil en développement durable Maobi, cette approche influence fortement la conception des produits, qui devient éco-conception, puisqu’ils doivent avant tout remplir une fonction et durer : « Pour illustrer ce concept, on prend souvent comme exemple le fait de ne plus vendre un pneu pour lui-même, mais un nombre de kilomètres parcourus, explique-t-elle. Dans le domaine du mobilier, il y a des fabricants qui ne vendent plus aux hôteliers des literies, mais des nuitées avec un ensemble de services pour les nettoyer et les remettre en état le moment venu. Le changement est important, car la relation entre fabricant et le client ne se limite plus à une transaction ponctuelle, mais prend la forme d’un contrat plus ou moins long, où le produit s’accompagne de services pour qu’il puisse remplir sa fonction dans le temps. »

De gauche à droite : Philippe Denavit (Groupement des agenceurs), Fabrice Poncet (la Fabrique) et Cathy Dufour (Ameublement français).

L’économie de la fonctionnalité est aussi le thème qui a été retenu par Domocité en 2021, ce cluster de la région lyonnaise qui réunit des architectes aux designers en passant par les fournisseurs et les agenceurs, pour mener des programmes de recherche sur les scénarios possibles d’évolution des aménagements intérieurs. Dans le cadre de ce programme, une vingtaine de participants ont imaginé quatre projets, en partenariat avec Éco-Mobilier, parmi lesquels un lieu de coliving, un modèle qui est en plein développement. Ce concept réunit 4 foyers multigénérationnels, qui décident de vivre dans un même lieu, où on trouve des espaces de vie privatifs et des espaces communs, comme la cuisine, le séjour, le salon, qui doivent accueillir harmonieusement et en même temps des activités différentes. « L’intérêt de ce projet est qu’il nous a amenés à concevoir des mobiliers et aménagements innovants et multifonctionnels, inclus dans une offre globale comprenant la location des murs et des services additionnels comme la conciergerie, pour un coût qui n’est pas supérieur à une location classique », commente Benoît Godon, responsable éco-conception chez Éco-Mobilier. Pour répondre au concept d’économie de la fonctionnalité, la conception des aménagements de ce coliving inclut aussi un ensemble de services pour maintenir la valeur d’usage des produits – il faut qu’ils soient réparables, c’est-à-dire démontables, qu’il y ait des pièces détachées, et qu’on puisse faire évoluer leurs finitions pour les remettre au goût du jour… – qui sont eux aussi une source de valeur pendant toute la durée du contrat, sans oublier bien sûr la reprise du mobilier en fin de vie. Un exercice similaire a été réalisé pour les trois autres projets du cru 2021 de Domocité, tous inscrits dans l’économie de la fonctionnalité, à savoir un foyer monoparental, dont les cloisons sont modifiables pour suivre la croissance des enfants, mais aussi un kiosque multifonctionnel pour offrir des services à une station touristique, et enfin un concept évolutif d’espace tertiaire, pour une entreprise qui souhaite améliorer l’expérience de vie au bureau.

Location et contrat de servicesCette journée d’échanges a aussi été l’occasion de s’interroger sur la pertinence, en particulier pour les exploitants hôteliers et restaurateurs, de louer son mobilier plutôt que de l’acheter, dans le cadre d’une économie de l’usage plutôt que de la propriété, une idée qui elle aussi fait son chemin. Pour aller plus loin, l’Ameublement français a commandé à Adrien Lanotte, chargé d’études chez MKG Consulting, une société de conseil qui accompagne les acteurs de l’hôtellerie et du tourisme, une étude approfondie sur le sujet. «La crise de la Covid-19 a fortement impacté le secteur, puisque le taux d’occupation de l’hôtellerie a été en forte baisse en 2020-2021 par rapport à la décennie 2009-2019, explique le consultant. En septembre, on est revenu à seulement 60 % du taux d’occupation d’avant crise, et les experts anticipent encore un marché à – 8 % en France et – 14 % à Paris en 2022. Dans ces conditions, les hôteliers s’interrogent sur leur modèle, et la pertinence d’en changer. »

Pour aller plus loin, Adrien Lanotte est allé au-devant des hôteliers et restaurateurs, ce qui a permis d’établir que 29 % d’entre eux ont déjà recours à la location pour certains produits comme les machines à café, les télés, les photocopieurs ou encore le matériel informatique. Et ils y trouvent leur compte : presque 9 sur 10 relèvent avec satisfaction que la location inclut la maintenance, ce qui fait que tout matériel défectueux est réparé ou remplacé.  Pourrait-il en être de même pour le mobilier ? 43 % des personnes interrogées avouent qu’elles n’y avaient pas pensé, mais se disent favorables. Ils sont même 63 % à être intéressés parmi ceux qui louent déjà d’autres produits, et même 73 % parmi ceux qui se disent satisfaits de ce qu’ils louent déjà… Selon une évaluation du consultant, 23 % environ du mobilier contract pourrait être commercialisé sous la forme de la location. Celle-ci garde malgré tout une image ambivalente : en négatif, elle est rejetée parce qu’elle est considérée comme plus chère, au bout du compte que l’achat ; en positif, elle a l’avantage d’offrir des services comme la réparation, le remplacement, la reprise en fin de contrat, qui donnent de la visibilité et de la souplesse à l’exploitant.

L’intervenant a conclu en disant que le fabricant de mobilier pour le contract a le choix entre différentes formules de location, qui peuvent être résumées en trois grands modèles. Il peut, tout d’abord, uniquement fournir ses produits à une plateforme ou à loueur qui prend en charge l’ensemble de la prestation – c’est la formule la plus légère – mais la valeur créée par les services est captée par le loueur. Deuxième cas, il peut vendre son mobilier à un partenaire financier, qui contractualise avec l’utilisateur final et supporte le risque, en conservant en tant que fabricant la fourniture des services associés. Enfin, il peut louer en direct, en contractualisant sans intermédiaire avec le client final, auquel il propose le produit, le volet financement, et l’ensemble des services, de la livraison à la maintenance jusqu’à la reprise en fin de contrat. Avec cette formule, le fabricant doit supporter le risque des impayés, mais il n’a pas de frais de commissions à payer à des partenaires, et il capte toute la valeur créée par les services, dont la reprise en fin de contrat avec la possibilité de donner au mobilier une seconde vie. On l’aura compris : l’intérêt de la location est de créer une relation avec le client pour lui vendre des services dans la durée. L’étude réalisée par MKG Consulting sera bientôt mise à la disposition des adhérents de l’Ameublement français, ainsi qu’un contrat type élaboré par le cabinet, à l’attention des fabricants intéressés par ce nouveau modèle.

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[Palmarès Contract 2021]Le contract, un lieu d’expression pour le made in France

Catégorie « Sustainability »

Lauréat : Résidences pour la Ville de Paris

Le client : RIVP

L’architecte : Ignacio Prego Architecte

Les fabricants : Square Solutions et Initiatives solidaires

Les mobiliers et aménagements de ce projet sont réalisés avec 95 % de matériaux issus du réemploi, en partie par une équipe en insertion avec des techniques de menuiseries artisanales, ce qui en fait un modèle d’économie circulaire.

Residence Ville de Paris – (c) Virginie Poli

Catégorie « Signature »

Lauréat : restaurant Le Taillevent (Paris 75008)

Le client : CBRE

L’architecte : Saguez & Partners

L’agenceur : EMAB

Ce projet de prestige se caractérise par la cohabitation de micro-espaces qui créent de l’intimité sans cloisonner l’ensemble du lieu. Les matériaux et la mise en œuvre ont été réalisés par des entreprises françaises.

Le Taillevent – (c) EMAB

Catégorie « Prospective »

Lauréat : MK2 Paradiso (Paris 75012)

Le client : Hôtel Paradiso

L’architecte : Alix Thomsen

Le fabricant : Resistub Productions

Cet hôtel innovant propose une nouvelle expérience du cinéma, avec la possibilité de voir un film soit dans une salle privative, soit en plein air sur le toit, soit de sa chambre confortablement installé ou de son lit.

MK2 Paradiso – (c) Romain Ricard

Catégorie « Ambassadeur »

Lauréat : Navire Commandant Charcot

Le client : Ponant

L’architecte : Jean-Philippe Nuel et Jean-Michel Wilmotte

Le fabricant : Ligne Roset

Les aménagements de ce navire destiné à la croisière et à l’observation scientifique du grand nord ont été conçus de manière à fournir un grand confort tout en minimisant l’impact environnemental lié à leur fabrication.

PONANT_POLAR_main lounge_(c) Studio Jean-Philippe Nuel

Catégorie « Savoir-Faire »

Lauréat : Siège social de VINCI (Nanterre 92000)

Le client : VINCI

L’architecte : Viguier

L’agenceur : Brouillet productions

Ce projet se distingue par ses agencements monumentaux, réalisés avec les savoir-faire de l’ébénisterie traditionnelle, qui créent des espaces de convivialité à l’intérieur d’un immense hall.

Siège social Vinci

Coup de cœur du jury

Lauréat : Mercato Metropolitano à Saint Mark’s Church (Londres, Royaume-Uni)

Le client : MM E&C LTD

Le fabricant : Fermob

La créativité de ce lieu d’activités culturelles tient à son installation dans une ancienne église du XIXe siècle, ainsi qu’au dialogue instauré entre les coloris du mobilier et ceux des décors et vitraux de l’église.

Mercato Metropolitano – (c) Mercato Mayfair LTD
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