Démocratiser les tendances du marché, accentuer la personnalisation et introduire des catégories inédites : la nouvelle stratégie dévoilée par But lors de sa précédente convention vendeurs, en 2018, semble aujourd’hui porter ses fruits, puisque l’enseigne annonce une part de marché en hausse (+ 0,89 point) sur son dernier exercice… Ainsi, l’édition 2019 de cet événement interne a permis de confirmer ces orientations, en insistant sur une montée en gamme générale – réelle ou perçue – tout en conservant l’accessibilité à travers un positionnement prix optimal, voire agressif.
4 000 m² d’exposition, 1 100 chefs de rayons et vendeurs reçus, 44 stands fournisseurs : ces chiffres, en légère hausse comparé à la précédente édition, témoignent de l’importance de cet événement annuel interne qu’est la convention vendeurs de But, pour les produits meublant / literie / sièges / déco (la cuisine et l’électroménager sont traités à part). Ainsi, les équipes se sont retrouvées la semaine dernière à l’Hippodrome de Paris-Vincennes pour découvrir les nouveautés produits, mais aussi – et cela était l’orientation de cette session 2019 – ajuster leur formation en matière d’accompagnement et de satisfaction du client, via un accent sur le merchandising et les prestations proposés par l’enseigne. Des dispositifs mis en place pour renforcer les orientations stratégiques dévoilées lors de la précédente édition et qui, à coup sûr, portent leurs fruits puisque sur son dernier exercice (clos au 30 juin 2018), But annonce un CA (total enseigne) à 2,137 milliards d’euros, soit une part de marché à 14,24 %… ce qui représente un gain de 0,89 point par rapport à 2017. Cela avec, en toile de fond, un marché du meuble à – 2,7 %, au sein duquel la Grande Distribution Ameublement affiche – 3,9 % (chiffres 2018, année civile). « Songez qu’en 2000, But représentait 7,5 % du marché du meuble, souligne Alexandre Falck, à la tête de l’enseigne depuis octobre dernier. Ceci nous fait dire que le développement commercial s’inscrit vraiment dans les gènes de l’entreprise ». Et pour l’heure, après un exercice 2018 qui fut donc en légère croissance – avec notamment de belles performances, voire « superformances » sur le meublant jour et le siège – celui en cours (sur le point d’entamer son dernier quadrimestre) rend « très satisfait » le dirigeant.
Transversalité des styles
Cette convention meubles 2019 aura ainsi servi à enfoncer le clou quant aux axes stratégiques récemment adoptés par l’enseigne qui déjà, l’année dernière, mettait en avant sa nouvelle dynamique sur l’offre déco, afin de pouvoir composer son offre globale de manière transversale : « Nous avons beaucoup travaillé la diversification des styles, explique Maï Fraissinet, responsable département Meuble Jour. Cela nous permet de présenter des ambiances globales en magasin, par inspiration, et de mettre en valeur le meublant avec des accessoires ». A l’image du pavé tables et chaises par exemple, recréé à l’Hippodrome de Vincennes exactement sous la forme qu’il revêt actuellement dans une centaine de magasins tests, c’est-à-dire intégrant une colonne composée d’une sélection d’articles d’arts de la table… La décoration saisonnière, également, est particulièrement valorisée en point de vente : « Ces collections permettent d’apporter de la fraîcheur à nos gammes, un air de renouveau, souligne Vanessa Vaugeois, directrice du département Design & Style. Nous savons que les clients de But viennent en magasin, en moyenne, 1,5 fois par an : ainsi, en faisant évoluer ces collections tous les six mois, l’impression de nouveauté est toujours là ». Générant, pour l’instant, un peu moins de 10 % du chiffre global de l’enseigne – mais représentant la moitié des volumes – la décoration est donc une famille stratégique pour But, qui lui offre encore de belles opportunités de croissance… d’autant que de nouveaux sourcings ont récemment été ouverts en Inde. Ces opportunités sont aussi portées, a priori, par le nouveau concept actuellement testé, depuis l’été dernier, à Rouen Tourville et Plaisir : un format de magasin proposant une expérience d’achat totalement repensée autour, notamment, de mises en ambiance abouties et d’un vaste pôle déco. « Les mouvements sociaux de fin d’année ont impacté les activités de ces points de vente à une période stratégique, précise Olivier Hattu, responsable département Décoration. C’est la raison pour laquelle nous nous laissons un peu plus de temps, par rapport au planning initialement prévu ».

44 stands fournisseurs – meublant, literie, décoration, sièges – étaient répartis sur plusieurs niveaux de l’Hippodrome de Vincennes
« Redonner de la valeur »
Outre la transversalité des styles, un autre pilier majeur de la stratégie de l’enseigne s’articule autour de la valeur du produit. Ainsi, sur la majorité des familles du meuble, But opère une montée en gamme… qui ne doit pas l’empêcher de rester sur un positionnement prix optimal voire agressif, comme le résume – en inststant – Pascal Darbon, responsable département Meuble Nuit : « En fait, il s’agit de discounter les codes du haut-de-gamme, ce qui nous permet de rester accessible, conformément à l’ADN de But ».
Comment cette démarche se matéralise-t-elle ? Ce sont les matériaux, tout d’abord, qui évoluent, avec l’apport de massif, par exemple, sur les tables. Ensuite, les esthétiques sont retravaillées pour être encore plus qualitatives et identitaires et sur ce point, le cas de la chambre à coucher est parlant : sur les 17 modèles exposés lors de cette convention 2019, quatre étaient particulièrement mis en avant, aux styles très différents. « Ce sont des produits inédits, plus cossus, inspirés des looks de l’hôtellerie, détaille Pascal Darbon. Dans ce cas précis de la chambre, nous avons voulu monter en gamme en divisant de moitié nos Q1 et Q2, pour augmenter notre offre en Q3. C’est très stratégique, puisqu’il y a un gros potentiel sur ce type de produits : nous voulons redonner de la valeur à la chambre ». L’enseigne ajuste son offre, notamment en dévoilant des produits exclusifs – rappelons qu’environ 10 % de l’offre, toutes familles confondues, sont propres à l’enseigne puisque designés en interne – relayant au plus près les tendances du marché : « Nous sommes capables, sur cette convention de mars 2019, d’exposer un produit revêtu d’un décor dévoilé à Cologne il y a deux mois à peine, se félicite Pascal Darbon. C’est une très belle rapidité d’exécution ». Mention spéciale à l’ensemble « Relief », conçu en interne, doté d’une armoire astucieuse offrant à la fois portes coulissante et ouvrante… La montée en gamme s’observe également sur l’offre boxspring, lancée l’année dernière et jusqu’alors toujours en phase de test : « Nous nous sommes aperçu que l’entrée de gamme ne fonctionne pas, donc nous avons arrêté deux produits sur les quatre, afin de renforcer le milieu de gamme sur cette famille » avance le responsable de département, désignant un ensemble boxspring TPR à 2 000 euros, présenté avec armoires et chevets pour augmenter la valeur perçue. Pour rester dans le domaine de la literie, et faire la transition vers le segment des matelas, précisons que But – qui, sur ce point, a renouvelé 100 % de son offre en deux ans – annonce enregistrer « une très belle progression » de ses résultats. L’enseigne présentait notamment, sur cette convention 2019, le produit e-bed de Bultex, pour lequel elle bénéficie du lancement exclusif dès avril, pour quelques semaines : il sera mis en vente au prix de 680 euros.
Evoquons, enfin, la famille des canapés et autres sièges rembourrés, qui a généré des résultats « exceptionnels » sur l’exercice 2018 : « Cette année, nous dévoilons de très belles évolutions sur ce produit, souligne Maï Fraissinet. Nous voulons continuer d’enfoncer le clou sur la montée en gamme et la personnalisation ». Ainsi, nouveaux modèles et revêtements intègrent l’offre, associant confort et esthétique, proposés à des rapports qualité / prix « optimaux ».
« Un gros vendeur de fonctionnalités »
La montée en gamme se fait également grâce à l’ajout de fonctionnalités, particulièrement sur les familles sièges et meublant. But mise, en effet, sur des dispositifs phare pour étoffer son assortiment : la collection de petits meubles de séjour, par exemple, a été intégralement refondue en deux ans, et offre aujourd’hui des produits dotés de multiples astuces… « C’est une famille très porteuse chez nous, en progression à deux chiffres depuis quelques mois » fait remarquer Maï Fraissinet. Très stratégique aussi : le fameux concept de meuble TV « TopLine », aux 5 500 combinaisons, personnalisable grâce à un logiciel dédié et livrable en une semaine dans tous les magasins du réseau, avec même quelques versions détenues en stock. Pour autant, l’ajout de fonctionnalité ne doit pas entraver à la compétitivité de l’enseigne, et en cela, la meilleure illustration de cette stratégie est bien le produit « Extenso », rangement modulable entièrement équipé, composable à partir d’un logiciel ludique et accessible avec chiffrage en temps réel… et proposé moins cher, à équipement comparable, par rapport aux concurrents de la grande distribution et des GSB. Un argument de vente rendu possible, entre autres, grâce à la synergie mise en place depuis deux ans, suite au rachat par l’Autrichien Lutz, qui permet ainsi de mettre en place des conditions d’achat optimales (et parfois exclusives…) grâce à des synergies au niveau des fournisseurs : « Elles se font dans les deux sens, fait remarquer Flavien Dhellemmes, directeur général Achats But, car grâce à cela, des industriels français, qui étaient nos fournisseurs, ont pu arriver de l’autre côté du Rhin ». La synergie se fait aussi en matière de design et styles puisque, comme l’explique le directeur commercial et décoration Laurent Seifert, deux collections seront communes à But et Mömax l’année prochaine. Encore de beaux projets en perspective.
[Zoom]
« Ne pas s’intéresser à Conforama ? Ce serait une erreur professionnelle »
Avec un réseau déjà bien étoffé – 308 magasins sont répartis sur l’ensemble du territoire, sous les formats But et But Cosy – l’enseigne a toutefois encore de belles opportunités de progression… en témoignent les deux ouvertures prochaines, prévues sous peu à Rezé (44) et Saran (45), résultant de la conversion de points de vente qui étaient sous enseigne Fly. Cette dernière, pour autant, ne sera pas reprise par But, comme on pouvait l’imaginer il y a quelques mois, lorsque l’acteur avait annoncé être en négociations exclusives pour mener à bien une telle opération : « Ce projet a finalement été abandonné » lâche Flavien Dhellemmes, évoquant « un délai trop court ». Mais toujours est-il, donc, que selon l’équipe dirigeante, les deux formats de But peuvent encore beaucoup s’étoffer sur le territoire, pourvu que ce renforcement du maillage soit soutenu par le digital… « Nous sommes en train de développer des solutions numériques sur la base de notre maillage autour des grandes villes » avance Alexandre Falck, qui évoque également des possibilités de croissance hors de nos frontières. Et sur l’épineuse question du « cas » Conforama, et les rumeurs de rachat potentiel par But (ou plus exactement par ses actionnaires, l’Autrichien Lutz et le fonds d’investissement CD&R), le dirigeant de l’enseigne laisse planer le doute : « Ce qui arrive à Conforama n’est évidemment pas bon pour notre secteur. Il faut un projet sain pour cet acteur. Partant de cela, ce serait une erreur professionnelle de ne pas s’y intéresser… » Et de conclure simplement : « Nous devons continuer de gérer nos entreprises en bons pères de famille, comme si elles étaient des PME ».