Depuis l’annonce, ce mardi 5 décembre, du lancement de nouvelles enquêtes concernant des « irrégularités comptables » au sein du groupe Steinhoff – ayant entraîné, dans la foulée, la démission de son dirigeant Markus Jooste – les nouvelles sur le géant sud-africain se succèdent, sans qu’une piste de sortie de crise ne se dessine, encore, à ce jour. Le groupe qui, depuis, a mandaté Moelis et AlixPartners en tant que conseillers, et chargé PwC de mener un audit, a également annoncé vouloir « [se] doter d’un confort supplémentaire en matière de liquidités ». Steinhoff aurait donc l’intention, entre autres, de céder des participations dans les groupes sud-africains PSG Group et KAP Industrial, ce qui lui permettrait de récupérer plus d’un milliard d’euros ; par ailleurs, deux milliards pourraient également être générés par la vente d’actifs non stratégiques de sa filiale africaine…
Si la publication des comptes du dernier exercice est toujours repoussée jusqu’à nouvel ordre, la prochaine échéance importante, en revanche, sera la réunion organisée mardi prochain (19 décembre) à Londres, qui réunira ses interlocuteurs financiers (banquiers, assureurs…) ; des actionnaires privés et un pool de banques – dont BNP Paribas – seraient même en train de constituer un projet de refinancement du groupe, sur lequel davantage de détails seront sans doute livrés à la suite de cette réunion… Malgré tout, pour l’instant, l’attente demeure, et cette crise entraîne déjà plusieurs bouleversements dans la profession, en plus de nourrir une inquiétude croissante puisque ses conséquences, comme on peut l’imaginer, peuvent être très graves…
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Les répercussions sur les industriels du meuble, le cas Cofel
Premier effet concret et immédiat auprès des nombreux industriels fournisseurs des enseignes de Steinhoff – parmi lesquels plusieurs Français : les assureurs crédits qui diminuent très fortement – jusqu’à 75 % – leur couverture, ce qui place ces fabricants face à un dilemme ; autrement dit, doivent-ils continuer à livrer les distributeurs du groupe Steinhoff, à leurs risques et périls puisque sans la couverture de leurs assureurs, ou bien tout stopper ? Ont-ils, seulement, le choix…
En restant du côté de la fabrication, mais en tentant, cette fois, d’appréhender les conséquences que pourrait avoir cette affaire, il est évidemment légitime de pencher sur le groupe Cofel : celui-ci, rappelons-le, avait fait entrer le Sud-Africain dans son capital, à hauteur de 50 %, il y a un peu plus d’un an. Aujourd’hui, cet actionnaire se trouve en pleine tourmente et manque cruellement de liquidités… Que pourra-t-il alors se passer ?
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Effondrement ? Démantèlement du groupe ? Et quid de la filiale Conforama ?
Concernant la distribution, les regards se tournent aussi, bien évidemment, vers Conforama. Au même titre que les nombreuses autres filiales de Steinhoff, l’avenir du numéro deux du meuble en France semble flou : parmi les issues possibles de cette crise, l’effondrement ou le démantèlement de la maison-mère sud-africaine sont les deux principales probabilités… Dans ce cadre, si jamais Conforama venait, à terme, à se trouver en quête d’un repreneur, quelles seraient les conditions et les enjeux de l’opération ? On peut imaginer – même si cela reste encore bien évidemment dans le domaine de l’hypothèse, et qu’il est prématuré d’envisager une telle chose – que ce repreneur, a priori, pourrait plus vraisemblablement être un fonds plutôt que l’un des autres « géants » du meuble – autrement Lutz ou Ikea – dans la mesure où dans ce cas de figure, l’autorité de la concurrence ordonnerait, comme on l’imagine aisément, de fermer un nombre significatif de magasins : l’intérêt du rachat de Conforama s’en trouverait ainsi, pour eux, très limité. Mais dans tous les cas, si une reprise de Conforama venait à s’envisager, il est très difficile, pour l’instant, d’imaginer les modalités d’une telle opération et la stratégie à laquelle elle obéira.
Pour l’heure, de manière générale, les filiales de Steinhoff ne commentent pas l’actualité de leur maison-mère, mais jugent tout-de-même nécessaire de transmettre des informations rassurantes, lorsque nécessaire, sur leur propre situation : c’est notamment le cas des fabricants de cuisines Impuls et de salles de bains Puris Bad.

Même si, avec le recul, elle pouvait sembler latente depuis cet été – avec, souvenons-nous, l’annonce d’une enquête de la justice allemande lancée sur quatre de ses dirigeants – cette plongée du groupe Steinhoff intervient à cette période cruciale qu’est la fin d’année. La réunion du 19 décembre apportera peut-être de nouveaux éléments, mais en attendant, les acteurs du monde du meuble et les salariés du groupe sud-africain, impactés par cette « bombe », ne sont confrontés qu’à une sombre incertitude générale et à de multiples questions.