Réduction et récupération des déchets, réglementations à venir sur l’étiquetage environnemental et la qualité de l’air intérieur, nouvelles attentes des consommateurs… Les raisons ne manquent pas pour inciter les entreprises à se lancer dans l’éco-conception.
Mais par où commencer ?
Faut-il rechercher une certification et si oui, laquelle ? Quels sont les enjeux pour aujourd’hui et pour demain ?

Meubles de bureau Gautier, qui s’est lancé dans l’éco-conception depuis 2002
Un nombre croissant d’entreprises du secteur du meuble, de la cuisine, de la literie, se lancent dans une démarche d’éco-conception, qui consiste à concevoir des produits respectant les principes du développement durable et l’environnement, en utilisant autant que possible des ressources renouvelables, et en recherchant une valorisation des déchets qui favorise le réemploi, la réparation et le recyclage. Pourquoi ? « Même si l’éco-conception n’est pas aujourd’hui obligatoire d’un point de vue réglementaire, tout un contexte se met en place qui pousse les entreprises à évaluer et réduire les impacts de leurs produits sur l’environnement, explique Jean-Marc Barbier, responsable de la cellule Vica (Veille Innovation Conception Amélioration Continue) au sein du pôle Ameublement du FCBA. L’enjeu, pour elles, est donc d’anticiper les réglementations à venir, afin d’être prêtes au bon moment. »
Une véritable dynamique écologique s’est enclenchée, en effet, à partir du Grenelle de l’environnement de décembre 2007, qui a fixé parmi ses objectifs « l’adoption de modes de production et de consommation durables », et « l’instauration d’un environnement respectueux de la santé », avec des conséquences concrètes pour les fabricants de meubles : un affichage environnemental sera bientôt obligatoire pour tout meuble mis sur le marché, qui devra indiquer au consommateur les impacts significatifs des produits et de leur emballage, notamment sur les gaz à effet de serre, l’air et l’eau. Autre réglementation à venir, celle qui portera sur la qualité de l’air intérieur : il faudra informer le consommateur, par un étiquetage, du niveau d’émission de substances volatiles, présentant un risque de toxicité par inhalation. Enfin, le Grenelle s’était fixé comme objectif de réduire drastiquement la quantité de déchets produits par habitant, en adoptant le principe de la Responsabilité Elargie au Producteur (Rep). Depuis début 2013, il s’agit d’une réalité avec la création des organismes Eco-mobilier et Valdelia, qui prennent en charge la collecte et la valorisation, respectivement, des meubles domestiques et des meubles professionnels en fin de vie. Les entreprises peuvent aussi faire le choix de l’éco-conception pour conquérir, par exemple, des niches de marché où les attentes environnementales des consommateurs sont fortes, ou pour satisfaire certaines clauses d’appels d’offres, qui sont déjà entrées en vigueur dans le cadre des marchés publics.
De nombreuses études montrent que les consommateurs sont de plus en plus préoccupés par la consommation responsable, c’est-à-dire en faveur de produits respectueux de l’environnement.
Identifier les impacts environnementaux pour les réduire
Une démarche d’éco-conception commence par une évaluation des impacts environnementaux de ses produits, qui prend en compte les matières premières, la fabrication, le transport, l’utilisation et la fin de vie.
A ce stade, les entreprises peuvent opter soit pour une Evaluation Simplifiée et Qualitative du Cycle de Vie (ESQCV), qui les orientera vers une auto-déclaration de leur démarche, soit vers une Analyse du Cycle de Vie (ACV). Celle-ci, qui correspond à une norme – Iso 14 040 à 14 044 – est une évaluation environnementale quantifiée, orientant les entreprises vers une certification à un Ecolabel – Marque NF Environnement-Ameublement, Ecolabel européen – qui présente une crédibilité plus importante, puisqu’elle est cautionnée, après contrôle, par un organisme indépendant. « Pour réaliser une telle opération avec succès, les entreprises ont tout intérêt à s’appuyer sur des compétences d’un organisme expert en éco-conception, surtout si c’est un sujet nouveau pour elles » , affirme Jean-Marc Barbier.
Pour ce qui le concerne, le FCBA a défini une prestation type qui se décompose en une phase d’analyse (rédaction du cahier des charges fonctionnel, analyse environnementale ou ACV simplifiée, analyse globale du produit), une phase de conception (recherche de principes, éco-design, développement technique, essais, prototypage) et une phase de valorisation de la démarche, qui comporte évaluation finale, et communication interne et externe (discours qualitatif, logo, plaquettes, certification…).
L’expérience montre que, dans l’ameublement, la majorité des impacts environnementaux résident dans les matériaux et composants utilisés, mais pas toujours puisque dans la cuisine, les impacts les plus importants sont générés par l’énergie que consomment les appareils électroménagers. De façon générale, l’éco-conception comporte un important volet de collecte d’informations auprès de ses fournisseurs, pas toujours faciles à obtenir, surtout s’ils sont géographiquement éloignés. Une fois identifiés les composants les plus impactants, on peut ensuite les remplacer par des composants plus vertueux pour l’environnement – par exemple des panneaux sans formaldéhyde ou des mousses de matelas sans dérivés du pétrole, à base de substances végétales – à condition qu’ils maintiennent les qualités (durabilité, valeur d’usage, confort) du meuble. La même approche d’analyse de l’existant, puis de recherche de produits alternatifs, est appliquée aux autres postes de l’ACV, en réduisant la production de déchets, les impacts liés à l’emballage et au transport, et en améliorant la valorisation en fin de vie, grâce à l’utilisation de produits recyclables ou qui facilitent la séparation des matériaux en vue de leur valorisation. « L’éco-conception est, par définition, une démarche personnalisée et sur-mesure, ajoute Yoann Montenot, designer / éco-concepteur au sein de la cellule Vica. Chaque entreprise doit donc définir sa propre stratégie en fonction de sa dimension, de ses ressources, de ses objectifs et de ses échéances. Nous constatons que, le plus souvent, la démarche est enclenchée sur un produit ou une gamme, avant d’être étendue par capillarité à l’ensemble de la production. En commençant petit, toutes les entreprises peuvent donc faire de l’éco-conception. »
Loin d’être une contrainte supplémentaire, l’éco-conception peut au contraire aider l’entreprise à résoudre un certain nombre de problèmes, en ne se limitant pas à une reformulation du produit plus vertueuse pour l’environnement, mais en allant jusqu’à son remplacement par un produit nouveau, qui correspond davantage aux attentes du marché, dans le cadre d’une démarche d’éco-innovation.