Après 3 exercices consécutifs en recul, le marché du meuble, comme prévu, renoue avec la croissance, et atteint 9,34 milliards d’euros TTC en 2015. Un résultat encourageant – à surface constante, l’évolution est de + 1 % – même si loin de rattraper les plus de 700 millions d’euros perdus entre 2012 et 2014… Grandes gagnantes de cette année 2015 : la literie et la cuisine, qui permettent également à leurs spécialistes distributeurs de se démarquer.

Après – 3 % en 2012, – 2,9 % en 2013 et – 1,5 % en 2014 – ce qui, au total, aura fait perdre plus de 700 millions d’euros au marché – le meuble retrouve des couleurs sur 2015, avec une progression de + 2,4 %, rabaissée à + 1 % à surface constante : évalué à 9,12 milliards d’euros en 2014, il s’établit désormais à 9,34 milliards… une valeur encore éloignée du pic constaté en 2011, où il était de 9,84 milliards. Car il ne faut pas effectivement perdre de vue que cette reprise si encourageante soit-elle, reste légère, et apparaît, pour l’instant, comme un mince rattrapage des exercices précédents : la valeur du marché en 2015 est, à peu de choses près, la même qu’en 2009… L’UNIFA, la FNAEM et l’IPEA ont décrypté, face aux journalistes, ces résultats, et exposé les enjeux futurs pour le marché du meuble sur les prochains mois, lors de la traditionnelle conférence de presse de début d’année, organisée ce jeudi 4 février.
Un rythme plus régulier
Alors qu’en 2014, on s’en souvient, seuls les mois de soldes étaient parvenus à générer de la croissance sur le secteur, la situation a été quelque peu différente l’année dernière, avec une progression plus soutenue tout au long des 12 mois. Déjà, début septembre dernier, les chiffres du premier semestre, qui laissaient apparaître une croissance globale de + 2,1 % – notamment générée par un mois de juin à près de + 7 % ! – pouvaient laisser espérer un exercice annuel dans le vert. C’est en effet au début de l’été que s’est réellement fait sentir la légère reprise du marché : même si les ventes se sont tassées en juillet, les distributeurs ont réussi leur rentrée, et le marché aligne des performances supérieures à + 5 % sur la période d’août à octobre…
La cuisine redevient un moteur
Les effets de cette inversion de tendance se répercutent sur toutes les familles de produits, à l’exception du meuble de salle de bains.
- Même si elle n’est donc plus le seul secteur en croissance – comme ce fut le cas de 2012 à 2014 – la literie continue d’observer, en revanche, la plus forte progression sur la période (+ 4,1 % en valeur) : avec 1,24 milliard d’euros, elle pèse 13,2 % du marché du meuble. La hausse des paniers moyens, obtenue grâce au développement des ventes de produits en 160 cm, aura été l’un des principaux facteurs de cette évolution… et les spécialistes en profitent, autant que la grande distribution. « Attention, toutefois, précise l’IPEA, le segment aura encore été fortement animé par les prix en 2015, ce qui pourrait, à terme, avoir un impact sur les performances du produit ».
- Après avoir connu 3 exercices difficiles, la cuisine retrouve son rôle de moteur du marché sur l’exercice 2015 : les ventes progressent de 3,8 %, pour atteindre 2,38 Mds€ (25,5 % du global). « Cette famille de produits continue de bénéficier de l’engouement des Français pour cette pièce centrale, et son potentiel de développement demeure important » souligne l’IPEA, rappelant que si, lors de l’exercice précédent, le segment avait pâti des contre-performances de la grande distribution, les ventes se sont redressées sur ce circuit en 2015, pour renouer avec de belles progressions sur le second semestre… Les spécialistes cuisine ont également enregistré de beaux scores : « Ceci montre, entre autres, l’efficacité des enseignes nationales pour doper le marché et inciter le consommateur au renouvellement ».
- Les sièges rembourrés, qui étaient tout juste parvenus à se maintenir en 2014 (- 0,2 %) malgré un marché global en repli, pouvaient laisser espérer une reprise à venir dans ce secteur, même si celui-ci souffre d’une chute de valeur et ce depuis plusieurs années déjà… Avec une croissance de + 3,6 % sur l’exercice 2015, les ventes de canapés, fauteuils et banquettes enregistrent donc une évolution positive pour la première fois depuis 2011. « La grande distribution voit ses ventes progresser, mais cette croissance est à mettre uniquement au crédit des canapés et fauteuils, analyse l’IPEA. Les ventes de banquettes y sont, pour leur part, en retrait. La marche en avant reprend sur les canapés et fauteuils chez les spécialistes ameublement milieu et haut de gamme ainsi que chez certains spécialistes salon, qui ont su se rapprocher du consommateur en multipliant les campagnes publicitaires TV ».
- Le mobilier de jardin enregistre la quatrième meilleure évolution, avec + 2,7 % (130 millions d’euros, 1,4 % du marché du meuble) grâce, essentiellement, aux belles conditions météo du début de printemps.
- Très légère croissance pour le meublant, avec + 0,4 % (3,02 Mds€, 32,4 % du marché) : « Les opérations de communication des principaux acteurs du marché du meuble mettent surtout en avant la literie, le meuble rembourré ou la cuisine au détriment du meublant » fait remarquer l’IPEA, constatant également que « la baisse permanente de la valeur de ce marché montre que la politique de prix bas ou barrés n’apporte pas de solutions réelles au consommateur ». Face à cette situation, une voie de progrès s’impose :
« Il reste à la profession tout un travail à mener, notamment pour mettre en avant toutes les solutions de rangement proposées par les industriels, cela au moyen de mises en ambiance et de conseils capables de répondre aux attentes du consommateur ». - Enfin, les ventes de meubles de salle de bains reculent de nouveau, avec – 4,2 % (240 millions d’euros, 2,6 % du marché total). Pas vraiment considérée comme une pièce à vivre, à l’inverse du salon ou de la cuisine, par exemple, sur lesquels les consommateurs ont tendance à concentrer leurs investissements, la salle d’eau souffre également encore trop des mises en chantier de logements neufs : reste, là encore, un gros travail à faire pour les acteurs concernés, afin qu’ils puissent développer le marché en le rendant moins dépendant de tels facteurs.
Une année de spécialistes !
- Bénéficiant des bonnes conditions de leurs secteurs respectifs, et récoltant les fruits de leurs efforts, les spécialistes cuisine (qui, notamment, continuent de développer progressivement un marché de renouvellement) et literie enregistrent les meilleures progressions sur le plan des circuits de distribution, avec, respectivement, + 4,8 % et + 4,5 %. « Les seconds peuvent déjà s’appuyer sur un marché de renouvellement dynamique, commente l’IPEA. Les performances sont encore au rendez-vous en 2015, notamment chez les grandes enseignes nationales ; l’exercice, en revanche, aura été plus difficile pour les magasins indépendants, qui ont encore enregistré de nombreuses fermetures. »
- Avec + 2,7 %, la grande distribution ameublement (qui, rappelons-le, englobe désormais les enseignes de l’équipement du foyer et du jeune habitat) détient 50,5 % du marché : « Les ouvertures ou reprises de magasins auront été nombreuses et auront permis d’entretenir la bonne dynamique du circuit, appuyée par les efforts sur la toile ».
- La bonne dynamique du secteur permet aux enseignes de l’ameublement milieu et haut de gamme de renouer avec la croissance (+ 1,6 % et + 1,7 %, représentant respectivement 10,6 % et 3,9 % du marché), grâce, entre autres, aux bonnes performances enregistrées sur la literie et le rembourré : « L’impact des marques ou enseignes sur le haut de gamme fait la différence, tandis que l’amélioration de l’assortiment renforce les performances des acteurs du milieu de gamme ».
- Enfin, après des années de recul, la croissance revient également chez les acteurs historiques de la VAD (+ 3 %, part estimée à 3,5 %) ; bonnes évolutions observées aussi chez les pure-players (même si leur activité est plus difficile à évaluer).
Le début d’une courbe ascendante ?
Selon les dernières prévisions, 2016 sera vraisemblablement l’année d’un redémarrage de l’immobilier (+ 5 % prévus pour les mises en chantier – voir CM&H n° 2628, daté du 1er janvier dernier). Les intentions d’achats des Français en matière de meubles, elles, sont aussi globalement en hausse [voir CM&H n° 2630, daté du 15 janvier], excepté pour le siège de salon et la cuisine… même si, pour cette dernière, elles restent tout de même élevées étant donné la nature du produit concerné et sa durée de vie. Si de telles promesses étaient honorées cette année… et les suivantes, ce premier exercice dans le vert pourrait marquer le début d’une courbe ascendante, et ainsi dépasser le stade du « rattrapage »… Il convient toutefois de rester évidemment prudent, puisque l’on pourrait considérer une reprise plus solidement installée d’ici 1 ou 2 ans, au minimum. D’ici-là, les efforts fournis par chaque acteur, si conséquents aient-ils été jusqu’alors, devront évidemment être maintenus.
[E.B]
Le point sur les initiatives et engagements de la filière
L’UNIFA et la FNAEM restent particulièrement actives pour dynamiser le marché. Si elles se disent « extrêmement déçues » du refus, de la part du gouvernement, d’autoriser le déblocage partiel d’une fraction des PEL au profit de l’achat de meubles neufs, les 2 organisations poursuivent leurs démarches pour conforter cette inversion de tendance.
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La Meublothérapie, initiée par la FNAEM
Rappelons que la FNAEM a lancé, début décembre dernier, la grande campagne Meublothérapie, qui a pour objectif de toucher un million d’internautes au cours des prochains mois… A travers un site web dédié et des pages spécifiques sur les réseaux sociaux (auxquels s’ajoutent des partenariats sur d’autres sites célèbres) et relayée dans près de 3 000 points de vente physiques, cette animation permet aux Français de bénéficier gratuitement de conseils de la part de spécialistes déco, et de gagner de nombreux lots.
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Le projet sectoriel des fabricants, AMORCÉ PAR l’UNIFA
Pour « trouver les moyens d’une révolution réellement porteuse et durable, et mettre en œuvre les leviers utiles au renouveau de la filière », l’UNIFA et les fabricants ont élaboré le projet sectoriel 2016 – 2021 de l’ « Ameublement Français » (nouvelle marque fédératrice de l’ensemble de la fabrication) autour de 3 axes stratégiques :
– Gagner en compétitivité, par la modernisation de l’outil industriel dans toutes ses dimensions ;
– S’approprier la demande en France et à l’étranger ;
– Construire de nouveaux business models, par la restructuration de la filière à moyen / long terme, afin d’en garantir la pérennité en travaillant différemment avec tous les acteurs de la chaîne de valeur.
« Chacun de ces 3 axes est doté de leviers d’action et d’outils concrets afin de poursuivre le même objectif : accompagner les industriels à passer de l’objet meuble au « projet ameublement »,
explique l’UNIFA. Ce point est essentiel considérant que le marché neuf de l’ameublement représente plus de 14 milliards d’euros en France, et que de nouveaux marchés se distinguent à l’étranger. » L’Union constate qu’il est aussi indispensable de prendre en compte l’innovation et les nouveaux modes collaboratifs émergents afin de répondre à la demande des consommateurs… Pour ce projet sectoriel, l’UNIFA a sollicité le haut patronage d’Emmanuel Macron.
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L’environnement
Les fabricants et distributeurs d’ameublement rappellent leur engagement « actif » sur le plan environnemental, plus précisément dans la montée en puissance de la filière de responsabilité élargie des producteurs de meubles (REP Meubles) : « A travers les 3 éco-organismes Eco-Mobilier, Valdelia et Ecologic, les acteurs du meuble participent, de façon croissante, à l’atteinte des objectifs fixés par la loi de 2015 sur la transition énergétique et pour la croissance verte, et la récente COP21 ».
A ce jour, 48 % des DEA sont recyclés… L’UNIFA et la FNAEM, en revanche, disent considérer comme
« inefficaces » les projets d’étiquetage des polluants volatils des meubles :
« La complexité technique des exigences semble disproportionnée au regard du bénéfice attendu. L’impact de ces projets doit être correctement mesuré, notamment l’intérêt d’une telle mesure pour les consommateurs et l’impact d’image que celle-ci pourrait engendrer à l’égard de notre filière. »
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Le dialogue social
Enfin, sur le plan social, les organisations professionnelles continuent de mener une politique active.
La FNAEM rappelle avoir signé, au cours des 6 derniers mois, 6 accords de branches avec les partenaires sociaux. Des contreparties sociales au travail dominical sont également en phase finale de négociation avec ces derniers, pour être actualisées dans le sillage de la loi Macron. La Fédération précise par ailleurs que partout en France – excepté en Région parisienne – est engagée la renégociation des accords départementaux définissant
« un nombre et un calendrier annuel d’ouvertures dominicales proportionnés et adaptés à ses réelles justifications économiques et sociales locales ».
De son côté, l’UNIFA, en concertation avec les partenaires sociaux, poursuit, depuis plus d’un an, le renouveau du dialogue social engagé il y a plus d’un an, dont elle fait un levier de croissance du secteur : « Aujourd’hui, il ne s’agit plus de subir les obligations sociales mais de les transformer en des facteurs clés de succès pour les entreprises » avance l’organisation. Cette dernière annonce également avoir engagé une étude prospective, cela afin de disposer d’un éclairage qualitatif et quantitatif sur les facteurs d’évolution de la branche professionnelle (innovation, export, digitalisation, évolutions de la distribution de détail, de l’offre produits / services…) et leurs impacts sur les métiers, les compétences, les besoins en formation. « Ces travaux visent à alimenter la réflexion des partenaires sociaux, pour anticiper les besoins de compétences des entreprises du secteur et définir une politique de formation, en adéquation avec les évolutions identifiées ».