Si la formation aux bases du métier de vendeur – connaissance des produits, techniques de vente reste incontournable, les enseignes sont aujourd’hui demandeuses d’actions de formation plus ciblées pour répondre à des problématiques précises (parcours client, politique de remises, conception, conseil en décoration,…) et plus courtes pour mieux répondre aux attentes des directeurs de magasins. Les acteurs de la formation leur répondent avec des formules de plus en plus personnalisées.

Formations pour les vendeurs
S’il est une chose qui ne change pas, c’est la finalité du métier de vendeur de meuble, cuisine ou literie : prendre en charge la vente, depuis l’accueil du client en magasin, jusqu’à la conclusion, c’est-à-dire l’acte d’achat. En cela, l’efficacité – et donc la compétence des équipes de vente est un levier essentiel pour assurer la bonne santé d’un point de vente, son développement et sa pérennisation. En revanche, c’est la manière de mener à bien cette mission qui est aujourd’hui en mutation. « Avec l’arrivée d’Internet, les attentes des clients vis-à-vis du vendeur ont radicalement changé, affirme Stéphanie Dupré, directrice générale de l’AFPIA Sud-Est. En conséquence, les enseignes modifient la formation de leurs vendeurs pour pouvoir y répondre. » Pour les vendeurs débutants notamment, la formation au titre certifié de « Vendeur Agenceur cuisines & salle de bains », proposée par l’AFPIA, d’une durée de 18 mois, reste une référence incontournable pour acquérir les bases du métier, à savoir les techniques de vente et la connaissance du produit. De même, spécifiquement dans la cuisine, le CQP de Concepteur-vendeur élaboré et lancé par le SNEC est une formation complète débouchant sur un titre professionnel, qui répond aux attentes des cuisinistes. En complément, la formation technique aux produits, et à leur fabrication, est en grande partie prise en charge par les fournisseurs, qui invitent les vendeurs à découvrir leurs process de fabrication en visitant leur usine. Cependant, ces formations ne semblent plus suffisantes aujourd’hui, face à un client très informé par Internet – les études montrent que 80 % environ des acheteurs vont se renseigner sur la toile avant de venir en magasin – qui a déjà lu tout et son contraire sur le prix des produits et les remises, qui est un fidèle des programmes télévisés qui parlent de coaching et de décoration… Elles sont aussi parfois inadaptées, pour des dirigeants d’enseignes ou de magasins qui ont besoin de former rapidement un nouveau vendeur, ou de perfectionner leur équipe sur un aspect précis du métier de vendeur. Un contexte qui pousse les enseignes à réviser leurs exigences, et les acteurs de la formation à leur proposer des réponses appropriées.

DES FORMULES SUR MESURE CO-CONÇUES AVEC LES ENSEIGNES
En premier lieu, face à un métier – la formation des vendeurs – qui se complexifie, les enseignes ont tendance à externaliser la formation. Si les grandes enseignes ont longtemps disposé d’une école de formation en interne, ce qui présente l’avantage de pouvoir maîtriser la transmission d’une culture « maison », il semble qu’elles préfèrent maintenant faire appel à des professionnels de la formation, qui ont une expertise en matière de pédagogie et d’outils numérique, et qui sont au fait des dernières tendances du marché.
Mais pas question pour autant de laisser carte blanche aux formateurs extérieurs : « A la demande des enseignes, nous les accompagnons de plus en plus dans la co-conception des formations, et nous intégrons leurs équipes dans le déroulement des sessions, ajoute la directrice générale de l’AFPIA Sud-Est. Diagnostic des besoins, listing des compétences acquises et de celles à acquérir, prise en compte de la stratégie de l’enseigne, sont les étapes qui mènent à l’établissement d’actions de formation sur mesure. » La tendance est donc aux actions de formation plus courtes, ciblées sur un aspect de la vente où un besoin a été détecté, et personnalisées pour chaque entreprise. A l’AFPIA Sud-Est, l’une des demandes récurrentes des enseignes concerne la formation à la conception et à l’agencement. Au moment où il est si facile d’acheter un produit en quelques clics sur Internet, les clients viennent désormais chercher autre chose auprès du vendeur : une expertise, une ré-assurance sur l’origine du produit, et un conseil pour concevoir chez eux une ambiance composée de plusieurs produits harmonisés entre eux.
Les vendeurs sont donc en première ligne pour permettre aux spécialistes ameublement de passer de simples vendeurs de meuble à fournisseurs d’un service d’aménagement d’un espace de vie et de décoration. Pour leur donner cette valeur ajoutée, l’AFPIA Sud-Est a par exemple ajouté à son catalogue une formation de « Concepteur vendeur d’ambiance », dans un format plus court, ou encore une formation au dessin à main levée, qui permet au vendeur de faire avec le client un croquis de son implantation, au crayon et à la gomme, une étape qui précède sa réalisation en 3D sur un outil informatique. « Cette étape est très bien perçue par le client car il s’agit d’une attention personnalisée qui fait appel à un savoir-faire et crée de l’humain dans la relation client, l’exact opposé du côté impersonnel d’Internet », ajoute Stéphanie Dupré. Pour répondre à une autre demande similaire, l’AFPIA Sud-Est a aussi créé une formation ciblée sur la réalisation d’une scénographie en magasin, une fonction essentielle qui peut être remplie par les équipes de vente, par exemple quand il n’y a pas de client en magasin. Les formations « sur mesure » ainsi dispensées sont d’une longueur variable – de 6 mois à quelques jours – à définir avec l’enseigne, en tenant compte des perturbations occasionnées par les actions de formation dans la bonne marche du point de vente. Une réflexion est en cours pour ramener la formation complète de
« Vendeur Agenceur cuisine & salle de bains », de 18 à 12 mois, et ainsi mieux répondre aux impératifs des dirigeants de magasins. En tant que tête de réseau en matière de formation des vendeurs, l’AFPIA Sud-Est intervient sur tout le territoire.

CUISINE : VERS UNE SEGMENTATION DES FORMATIONS
Dans le secteur de la cuisine, où le vendeur doit aussi être un technicien qui conçoit l’implantation au domicile du client, les choses sont également en train de bouger. Pour aider les cuisinistes à élever le niveau de leurs vendeurs, le SNEC a élaboré, avec les partenaires sociaux et dans le cadre de sa convention collective, différents Certificats de Formation Professionnelle (CQP) à commencer par celui de Concepteur Vendeur de cuisine, qui correspond aussi à un titre reconnu dans la formation professionnelle, délivré à environ 350 vendeurs chaque année, et correspondant à 380 heures de formation. Si ce CQP a grandement contribué à élever en compétence les vendeurs de cuisine, il semble aujourd’hui qu’il doive être adapté pour mieux répondre aux attentes des directeurs de magasins : « Le CQP de concepteur-vendeur de cuisine est une formation longue et très complète, qui fait du titulaire, en plus d’un vendeur, un concepteur, un technicien qui réalise les plans et un décorateur, ce qui fait beaucoup pour une seule personne, constate Thierry Rousset, administrateur et membre de la commission paritaire du SNEC. A l’issue de cette formation, on est en droit d’avoir un super-vendeur qui sait tout faire, mais dans la réalité cette super-compétence demande des années de pratique. »
A la demande des enseignes du marché, le SNEC a donc décidé de scinder ce CQP en deux, un CQP de « Vendeur – concepteur 1er niveau », pour apprendre à accueillir, concevoir et vendre, et un autre de « Vendeur concepteur technicien » pour apprendre à mener le chantier, et qui permettra aussi de former un métreur (ces deux CQP seront disponibles début 2016). Cet aménagement donnera davantage de souplesse aux cuisinistes : il sera ainsi possible de former rapidement un ou plusieurs vendeurs à l’accueil du client, à la conception et à la vente, pour renforcer l’équipe de vente d’un magasin, tout en confiant la visite chez le client et la partie technique de l’implantation à un autre salarié, spécialisé dans le métré et l’application des normes. « On ne peut pas être compétent en tout et qui plus est rapidement, ajoute l’administrateur du SNEC. Cet aménagement a pour but de répondre aux impératifs des cuisinistes, en leur permettant de répartir leurs efforts de formation, sans rien céder sur la nécessité de monter les vendeurs en compétence. » Ce mouvement de segmentation des formations se traduit aussi dans les autres CQP lancés en 2015 par le SNEC, le CQP Décorateur, le CQP Poseur, et le CQP Chef des ventes, qui s’adresse aux animateurs des équipes commerciales. Ces CQP sont délivrés par les 6 centres de formation labellisés par le SNEC, répartis sur tout le territoire.

INTERNET : UN AIGUILLON POUR LA TRANSFORMATION
Le développement d’Internet est un facteur d’évolution majeur pour la formation des vendeurs. Sur le plan technique, des formations se multiplient pour apprendre l’utilisation de nouveaux outils d’aide à la vente comme les tablettes qui permettent de configurer un produit personnalisé avec le client en magasin. D’autre part, en démultipliant l’information du consommateur final, Internet fait mécaniquement évoluer les compétences attendues du vendeur : de plus en plus souvent, il est devenu superflu de « renseigner » le client, alors qu’il a déjà tout appris ou presque sur la toile. Mais cette évolution en aucun cas ne remet en cause l’utilité du vendeur, désormais attendu pour corriger une idée reçue, rassurer sur l’origine d’un produit (par exemple sur le made in France, ses qualités environnementales, son faible impact sur la qualité de l’air intérieur), ou raconter une histoire (le fameux « story telling ») pour faire rêver l’acheteur final, des prestations qu’il ne trouvera pas sur un écran d’ordinateur. C’est toute la problématique du « parcours client » que le vendeur doit maintenant intégrer. La dimension « conseil »
et « décoration » du métier de vendeur est appelée à prendre de plus en plus de place, sans oublier le contact humain et la qualité du relationnel, qui pourraient devenir demain la première valeur ajoutée du vendeur.
[F.S.]