Redevenir bénéficiaire en 2019 et générer 50 % de croissance d’ici 2022 : tels sont les objectifs clairement affichés de Jacques Schaffnit, nouveau président d’Adova, entouré d’une solide équipe de direction. Deux plans d’actions majeurs ont été définis : d’une part, la rationalisation et la montée en puissance des 5 marques, avec une stratégie repositionnée, avant tout, vers le consommateur final, afin de donner de nouvelles armes à la distribution ; d’autre part, une profonde réorganisation de l’outil industriel, notamment en reconstruisant totalement les sites de Mantes / Limay et Bar-sur-Aube.
L’exercice 2017 devrait générer un chiffre d’affaires aux alentours de 210 millions d’euros – les 10 premiers mois étaient en croissance cumulée de 15 % – et même si des pertes subsisteront, elles seront évidemment réduites par rapport à celles de l’année dernière. 2018 sera vraisemblablement un nouvel exercice de transition… et les bénéfices retrouvés en 2019. Voici, en tous cas, le plan à moyen terme de Jacques Schaffnit, nommé président du groupe Adova par son propriétaire, le fonds Perceva, au printemps dernier, soit tout juste un an après la reprise. Une nomination qui est venue parachever la mise en place d’une solide équipe de direction, progressivement constituée au fil des mois : Charles Pasquis au poste de DAF, Amélie Thiriet au marketing, David Guffroy, nommé en même temps que Jacques Schaffnit pour piloter le volet industriel, Charles-Henri Déon, arrivé cet été en tant que directeur commercial, ainsi que Vincent de Corbier, nouveau DRH recruté il y a quelques semaines. S’y ajoutent François Duparc, qui assume aujourd’hui la fonction de vice-président, et Alain Boussuge, désormais consultant : « Ils ont joué un grand rôle au moment du rachat, et nous aident encore considérablement aujourd’hui » souligne Jacques Schaffnit. De toutes ces personnalités – hormis ces deux derniers – aucune n’est issue du secteur de la literie, mais toutes ont un point commun : une expérience forte dans leur spécificité, et un profil d’entrepreneur. « Etre entrepreneur, c’est avoir le courage de faire des choses compliquées, mais aussi de démontrer une capacité à amener des gens avec soi – ceux de son équipe – pour les faire converger vers un projet fort » avance Jacques Schaffnit. Et c’est justement cette façon de réfléchir « comme un entrepreneur » qui a conduit l’homme de 55 ans à accepter – avec un enthousiasme non dissimulé – la mission confiée par Perceva. Le redéploiement de groupe, il connaît : au cours de la trentaine d’années passées dans l’industrie, en plus d’avoir été aux commandes de grands acteurs internationaux (Hutchinson, Valeo…), Jacques Schaffnit a en effet pu mener à bien le retournement et le développement de Metalor, Ascometal ou encore RFS (joint-venture entre Alcatel et le Chinois Huaxin). Il est, ainsi, un parfait spécialiste des exigences de l’industrie et des environnements économiques actuels… « Le redéploiement d’Adova me motive à plusieurs titres, déclare-t-il. C’est un dossier qui, comparé à ceux dont j’ai pu m’occuper par le passé, n’est pas forcément gros par la taille, mais dans lequel je retrouve les grandes valeurs qui me sont chères : outre le made in France, je veux effectivement parler de ce côté « entrepreneur ». C’est cela que je veux développer en menant à bien ma mission chez Adova. Il s’agit, en d’autres termes, d’aller au-delà de la vision stratégique en amenant un élan, en élaborant un projet de A jusqu’à Z au sein d’une société européenne construite autour de marques fortes ». Et d’employer une métaphore particulièrement explicite : « Soit on refait les peintures, soit on repense l’ensemble du bâtiment. C’est cela que je veux ». Et repenser ce groupe – ex-Cauval devenu Adova – équivaut, pour son nouveau dirigeant, à refondre ses piliers, à « changer le modèle sur lequel il travaillait jusqu’alors ».

La structure des collections, mais aussi des produits en eux-mêmes (sur le plan des matériaux) doit être significativement simplifiée, pour une meilleure lisibilité du consommateur (ici, exemple de visuel institutionnel Simmons).
Côté marques : du « push » au « pull »…
Les premières concernées, dans cette stratégie, sont les marques. Et sur ce point, le virage est radical : désormais, les 5 signatures – Simmons, Dunlopillo, Treca, Diva, Steiner – constituent la base de la démarche globale, et leur redéveloppement permettra au groupe de s’appuyer sur elles, puisqu’elles sont au service de la distribution. « Jusqu’alors, les marques servaient avant tout à nourrir la communication et le marketing de nos clients revendeurs, à savoir la grande distribution ameublement ou les spécialistes, explique Jacques Schaffnit. Maintenant, nous voulons faire l’inverse : ce sont nos marques en premier. Leurs identités et positionnements, qui restent au service du distributeur, vont être repensés dans une stratégie réfléchie orientée sur le consommateur final : c’est une approche client différente. » Et d’ajouter : « Nous allons donc être à l’initiative de la mise en avant de nos produits dans les magasins. L’enjeu est alors de renforcer la prise en compte du consommateur, autrement dit de construire notre ambition en partant de lui – il est l’acheteur final, après tout ! – ce qui implique de comprendre parfaitement sa demande. Et cette démarche servira inévitablement, je le répète, aux distributeurs. » D’une stratégie « push », on passe ainsi à une action « pull », et ici tout l’enjeu est donc la mise en place d’un solide plan marketing pour étudier les profils et besoins de ce consommateur, cela afin d’ajuster le concept des marques censées y répondre et, bien évidemment, de valoriser ces dernières sur le marché.
… par la rationalisation…
Renforcer la prise en compte du consommateur final, c’est aussi lui apporter des marques plus lisibles, plus compréhensibles… qui seraient, par conséquent, encore plus percutantes sur un marché où la concurrence se fait rude. Le « chantier » des marques a été l’un des premiers à débuter suite à la reprise, et cela fait maintenant un an que leurs repositionnements respectifs sont travaillés les uns par rapport aux autres, l’idée étant d’apporter une identité globale bien spécifique à chacune d’elle. A ce jour, concernant les 3 marques literie, les concepts ont été ainsi définis :
> Dunlopillo – « la plus abîmée et la plus tirée vers le bas » à l’issue de la période tourmentée du groupe – a été complètement reconstruite. L’idée est, aujourd’hui, de mettre en avant sa qualité originelle de « créateur de matière », en d’autres termes le fait que cette marque maîtrise tout le cycle de fabrication du produit. L’élément alvéolaire développé par Dunlopillo (fabriqué à Mantes) est ainsi retravaillé depuis plusieurs mois, pour dévoiler, sur EspritMeuble, une collection 2018 avancée comme « totalement innovante ».
> Simmons, marque très technologique du groupe, est réorientée vers le haut ;
> Treca, de son côté, pourra désormais proposer ses produits premium – jusqu’alors réservés à l’export européen ainsi qu’au magasin parisien Le Bon Marché, sous la signature Treca Interiors – à des revendeurs de l’Hexagone. Repensée comme « une marque à part entière » du segment haut-de-gamme, elle continuera de miser sur le sur-mesure pour séduire aussi les prescripteurs par exemple.
Précisons, alors que nous évoquons justement l’export, que le groupe a également ajusté sa stratégie sur ce plan puisqu’à l’avenir, toutes ses filiales commerciales européennes auront la responsabilité de déployer les 5 marques sur leurs territoires respectifs.
Pour accompagner ces repositionnements, un solide plan marketing a donc été mis en place sous la houlette d’Amélie Thiriet (avec, notamment, la refonte des logos et un gros travail sur le digital).
La nécessité d’une simplification et d’une meilleure lisibilité a également incité les équipes à réfléchir sur une rationalisation significative des gammes : « Considérant qu’une collection est assimilée à un produit, disponible en plusieurs fermetés et dimensions, nous pouvons dire qu’aujourd’hui, chaque marque du groupe intègre encore des dizaines de collections de ce type, développe Jacques Schaffnit. Or, 10 collections par marque nous semblent être un maximum ! Nous avons déjà beaucoup réduit le nombre de références sur chaque label – de 40 à 50 % pour l’instant – et continuerons dans ce sens afin d’atteindre cet objectif final ». La rationalisation concerne également la composition même des produits – et ceci va donc aussi dans le sens d’une meilleure lisibilité – en simplifiant leur structure : « La multiplication des sous-couches, par exemple, est inutile sauf, peut-être, dans un but marketing. Mais en termes de bénéfice consommateur, elle n’est pas légitime ! Aujourd’hui, nous voulons faire des produits en réfléchissant intelligemment, afin de répondre de manière optimale et simple à ses besoins » résume le président du groupe, annonçant que cette rationalisation s’opèrera aussi, nécessairement, sur le plan des fournisseurs : « Actuellement, une quarantaine d’acteurs est à l’origine de 70 % de nos achats. Mais au total, nous en avons plus de 300, ce qui est beaucoup trop ». Le groupe attend évidemment des partenariats forts…