Jusqu’au 25 octobre à la galerie du Via, l’exposition Nouvelles vies montre que l’utilisation de matériaux recyclés est à la base d’une nouvelle façon de produire et de créer. Tandis que fabricants émergeants et éditeurs y voient une nouvelle source de valeur ajoutée, les éco-organismes Eco-mobilier et Valdelia entendent jouer un rôle moteur dans son développement.

Siège de la collection B2 (Valdelia, Api’up).
Après l’éco-conception, viendra l’upcycling… tel pourrait être le sous-titre de l’exposition Nouvelles Vies, très visionnaire, qui se tient actuellement au Via. Comme l’explique sa commissaire, l’architecte vénézuélienne Carolina Tinoco, « Face aux enjeux environnementaux, il est nécessaire de révolutionner la manière de concevoir, de produire, de vendre et de consommer. Ceci implique de repenser les objets, les machines, les ressources, les matières premières, l’énergie, le transport, les déchets… » Dans le secteur du meuble, ces enjeux vont se traduire de plus en plus, non seulement par la réduction des impacts environnementaux dans la production et la fin de vie (éco-conception), mais aussi dans la récupération et la réutilisation croissante de déchets destinés au rebut, pour en faire de nouveaux matériaux destinés à la fabrication de produits neufs, le tout créant un cercle vertueux appelé « upcycling » ou économie circulaire. Ce sont ces « nouvelles vies » des matériaux, et toutes les infrastructures nécessaires à ces nouvelles façons de se fournir et de fabriquer, qui sont aujourd’hui exposées au Via, à travers une trentaine de projets aux profils très divers. Avec une très bonne nouvelle : après avoir longtemps affiché une esthétique « pauvre » ou « triste », les objets issus du recyclage sont désormais le fruit d’un éco-design créatif et innovant.

Canapé Fossile.
Un procédé en cours de démocratisation
Contrairement aux idées reçues, les premières créations issues de l’upcycling sont venues de grands créateurs. Après le fauteuil Rag Chair (design Tejo Remi & René Veenhuizen, Pays-Bas, 1991), composé de vêtements usagés et de sangles en métal, qui est devenu une icône du design, on peut citer entre autres Philippe Starck, qui s’est prêté à l’exercice en créant la chaise Broom, à base de polypropylène de bois récupéré naturel, puis le splendide fauteuil empilable Soso, en aluminium recyclé, brossé ou poli à la main, deux créations éditées par l’américain Emeco en 2012 et 2016. D’autres designers se sont piqués au jeu en imaginant des meubles issus de déchets sous forme de pièce unique ou en toute petite série pour les galeries. C’est le cas par exemple du bench de la collection Skin, obtenu par l’assemblage de chaises usagées recouvertes d’une peau à base de chutes d’un très beau cuir, artistement collées, qui donne son unité à cette création (design Pepe Heykoop, Pays-Bas, 2011).

Le designer Amaury Poudray et Eric Weisman-Morel (Eco-Mobilier) devant le canapé Fossile.
Mais ce que montre aussi l’exposition, c’est que des acteurs émergeants du meuble s’approprient cette nouvelle façon de fabriquer dans une logique industrielle, c’est-à-dire en sécurisant leurs approvisionnements à base de déchets récurrents de l’industrie, ce qui leur permet de produire en série. C’est le cas par exemple de Maximum (Ivry-sur-Seine, Val-de-Marne), dont le fauteuil Gravêne et le tabouret Rotoman sont issus du thermo-moulage tantôt de granulés, tantôt de pièces témoins destinées à tester la qualité du matériau, deux déchets issus de l’industrie plastique qui jusqu’alors finissaient leur vie au rebut. Après le succès de ses sièges remarqués lors de la COP21, Maximum – distribué notamment par la Camif, partenaire de l’exposition – expose au Via une nouvelle collection d’objets, meubles et luminaires issus d’éléments d’avions Airbus recyclés. Autre exemple, Extramuros (Paris 20e) est une menuiserie solidaire qui propose aux salariés en précarité sociale des emplois dans ses ateliers de fabrication de mobilier à partir de matériaux de récupération, en premier lieu le bois. Pour sécuriser ses approvisionnements, cette association réutilise notamment les meubles usagés récupérés par l’industriel du mobilier de bureau suédois Kinnarps lors de ses livraisons de mobilier neuf.
Les éco-organismes à l’initiative
Partenaires de l’exposition aux côtés de l’Ademe, les éco-organismes Eco-mobilier et Valdelia s’engagent eux aussi dans l’économie circulaire…