Exposants à titre individuel, participants au stand collectif du GEM, ou encore sur celui des éditeurs émergeants français, les entreprises et marques françaises ont pleinement profité du visitorat mondial du Salon du meuble de Milan, pour renforcer ou développer leur activité au grand export. Sur le plan événementiel, le lancement de l’exposition Bad Taste For No Taste, qui fera la promotion de la création française à l’étranger, a été un temps fort du « off ». Revue de détail d’une présence française sous le signe de la conquête.

Stand du GEM.
Cette fois encore, le Salon du meuble de Milan 2017 a répondu avec brio aux attentes qu’il avait suscitées de la part du monde de la décoration, du meuble et du design. « Le Salon du meuble de Milan a été une semaine stimulante, pleine de positivité et d’enthousiasme de la part des entreprises, qui se sont montrées sous leur plus beau jour, depuis le génie créatif affiché par les architectes et designers, jusqu’au nombre énorme de visiteurs qui ont afflué à Milan pour voir les plus récentes innovations sur le salon et faire l’expérience du buzz de la ville », a déclaré Claudio Luti, le président du Salon du Meuble de Milan. Pour le Président de la République italienne, Sergio Mattarella, ce salon « n’est pas seulement une présentation d’expositions, mais aussi d’une culture qui symbolise une méthode de travail collective avec une approche particulière de la fabrication moderne. » En ce qui concerne les statistiques, l’ensemble composé par le Salon du Meuble, le salon biennal du luminaire Euroluce, et le salon des aménagements tertiaires Workplace a attiré 343 600 visiteurs venus des cinq continents – dans lesquels il faut inclure le grand public, accueilli pendant deux journées – ce qui représente une hausse de 10 % par rapport à la dernière édition comparable en 2015, mais une légère baisse par rapport à l’édition 2016 qui avait accueilli le salon de la cuisine Eurocucina. La manifestation dans son ensemble a accueilli plus de 2 000 exposants, dont 34 % d’internationaux. En plus de ce plateau mondial, il faut aussi mentionner l’importance du « off », puisqu’un grand nombre de marques soit profitent de leur show-room milanais, soit investissent un lieu éphémère pour des présentations de prestige pendant la design week.

Stand Matière Grise.
Toujours une belle qualité de fréquentation
Du point de vue des exposants français, tout le monde salue le formidable brassage du visitorat international, et l’énergie qui se dégage du salon, avec des constats légèrement différents en fonction des positionnements. « Nous avons constaté une baisse du visitorat, en provenance de 55 pays, ce qui est un peu moins que l’an passé tout en restant très élevé, et une fréquentation très variable entre le calme plat et l’affluence selon les moments, déclare David Soulard, directeur général de Gautier, qui exposait sur 300 m² dans le pavillon 14. Pour nous, cela tient aux années Euroluce, qui attirent moins le visitorat qui nous intéresse que les années Eurocucina. » Le dirigeant souligne aussi la concurrence avec le « off », qui semble capter un grand nombre de prescripteurs. Un point de vue partagé par Jérôme Armaroli, directeur général de Sifas : « Le visitorat a été pour nous en baisse par rapport à l’année dernière, en raison d’Euroluce, et peut-être des vacances de Pâques. Nous avons tout de même reçu des visiteurs de 40 pays, avec un retour en force de l’Europe de l’Est, de la Russie et de l’Amérique du Sud, ce qui reste nettement positif. » A contrario, les exposants qui proposent aussi du luminaire se frottent les mains de la tenue d’Euroluce : « Pour nous, la fréquentation est clairement en hausse par rapport à l’année dernière, déclare ainsi Mathieu Galard, directeur du design de l’éditeur Hartô, car nous avons vu beaucoup de distributeurs intéressés à la fois par le meuble et par le luminaire. » Un jugement partagé par Isabelle Mortreuil, directrice générale de Matière Grise, qui fabrique du mobilier et du luminaire en métal. Ajoutons que, du point de vue général, Milan est autant un salon de tendances qu’un salon de business : autrement dit, on y vient aussi pour capter l’air du temps, pour constater de visu ce qui se fait et se fera demain, en matière de matériaux, de couleurs et de styles, dans la décoration internationale. Un ensemble d’informations très précieuses non seulement pour les distributeurs, mais aussi pour les fabricants qui peuvent tester leurs nouveaux produits à grande échelle, et orienter leurs collections à venir.
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Un salon pour les marques internationales
En les regardant de près, les exposant français présents à Milan semblent se rejoindre sur deux critères principaux : une forte activité à l’exportation qu’ils veulent développer, et une marque forte avec un territoire associé. Fidèle de la manifestation depuis des décennies, Gautier incarne bien ce profil, puisque le fabricant du Boupère (Vendée) développe à un rythme soutenu son réseau de magasins, qui atteint aujourd’hui 115 points de vente en France et à l’international. Milan est donc un point de passage privilégié pour vendre ses nouveautés à ses clients français qui font le déplacement, et à ses distributeurs étrangers, tout en rencontrant des nouveaux partenaires à l’export. Mais l’entreprise affirme aussi son positionnement d’industriel du mobilier contemporain à 100 % de fabrication française, créateur innovant de ses collections exclusives : « Nous avons exposé sur le salon Nocturne de Préface, une gamme de lits relevables qui proposent en position relevée des fonctions de table de repas ou équipement multimédias, et sont une solution gain de place universelle pour l’aménagement des appartements urbains, déclare David Soulard. Autre innovation, nous avons lancé les tables grandes longueur et grande largeur de la collection Smart, qui accueillent jusqu’à 16 convives, avec des plateaux en céramique, pour répondre à une autre tendance, celle de recevoir ses amis chez soi. »

Exposition No Taste for Bad Taste
Le discours est proche chez Fermob, également fidèle au rendez-vous de Milan depuis de nombreuses années : « L’export, qui représente 48 % de notre chiffre d’affaires, est l’un de nos leviers majeurs de croissance, explique Armelle Ferrieux, directrice des ventes retail de l’entreprise. Cette édition 2017 a été excellente non seulement pour tous les contacts pris avec des distributeurs à l’international, mais aussi pour asseoir notre légitimité de créateur et fabricant de mobilier métallique, vis-à-vis du commerce de détail et de la prescription, puisque les architectes et décorateurs se déplacent aussi à Milan. » Une légitimité qui s’appuie en bonne partie sur un second levier, celui de l’innovation, comme le montrent les nombreuses nouveautés exposées, à commencer par les sièges – fauteuil Rythmic (design Archirivolto) très graphique, et tables – table pliante XXL Caractère, la plus grande du marché, table Ribambelle avec ses allonges modulaires pour accueillir jusqu’à 12 convives, deux modèles signés du Studio Fermob. Mais le territoire de la marque s’élargit avec une série de petits meubles – le guéridon avec plateau Happy Hours (design Studio Fermob) pour l’apéritif, la desserte Alfred (Pascal Mourgue), le guéridon Salsa (design Goula et Figuera)… – sans oublier les accessoires pour l’extérieur comme le pied de parasol Zébulon (design Auvrey & Perron), le plateau Alto, les jardinières Basket et Terrazza… et la lampe Balad (Tristan Lohner) que l’on emmène avec soi en promenade nocturne.
Changement complet d’univers avec Moissonnier, le grand couturier du mobilier d’ébénisterie, qui exposait pour la première fois au salon de Milan avec une satisfaction non feinte : « Notre positionnement entre la tradition et la créativité a longtemps été un problème, car nous n’avions pas de légitimité dans les halls de design, et nous n’étions pas à notre place dans les halls du meuble classique, explique Christine Duval, la directrice générale de l’entreprise. La création du secteur XLux consacré au luxe intemporel a été pour nous une solution idéale. » Ici encore l’entreprise, qui réalise les trois quarts de son activité à l’export, a pu nouer de très nombreux contacts internationaux – notamment dans les pays de l’Est, la Russie, le Moyen-Orient, l’Asie… – pour développer son réseau de distributeurs et son carnet d’adresse d’architectes et décorateurs. Sur un stand très sophistiqué, Moissonnier a également pu exprimer ce qui fait son ADN : « Nous avons exposé nos différents savoir-faire, à commencer par l’univers très « couture » de nos créations néo-classiques, dans un esprit garden-party avec des boiseries, un dressing, déclinés dans des teintes « Navy », ajoute Christine Duval. Autre dimension de notre stand, le sur-mesure, qui représente 50 % de notre activité, dans un esprit atelier qui traduit notre histoire artisanale et notre fidélité à la tradition de l’ébénisterie. » Au milieu de marques qui se ressemblent toutes, Moissonnier a, sans aucun doute, exprimé sa différence, et bien représenté la notion d’art de vivre à la française. Volonté de se développer à l’export et affirmation d’un territoire de marque sont aussi les raisons d’être à Milan d’autres marques françaises comme l’éditeur Petite Friture et le fabricant de mobilier outdoor Ego Paris…