Après avoir déclaré la présence d’ « impuretés non conformes » dans ses lots de fabrication, le chimiste allemand BASF déclare – en France, par la voix de son directeur développement durable – être toujours en phase de tests et descendre la chaîne de ses clients mousseurs et industriels, afin d’évaluer le degré de nocivité potentiel des produits qu’aurait engendré cette « erreur de dosage ». Cette communication indirecte associée, comme bon nombre l’estiment, à un manque de réactivité sur la réalité des risques, est dénoncée par les acteurs de la literie qui, néanmoins, s’organisent avec l’appui solide de l’Ameublement Français et la FNAEM.

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!!!!! Mise à jour du 11/10 au soir !!!!
- La DGCCRF confirme à la FNAEM la nécessité, pour les distributeurs, d’assurer la traçabilité jusqu’au consommateur des literies et canapés susceptibles d’être concernés par ce défaut de conformité.
- A cet effet, la FNAEM a demandé, via l’Ameublement Français, aux fabricants français de literies de fournir aux distributeurs, dès qu’ils le peuvent, la liste précise des produits concernés, avec leurs références précises et leurs dates de livraison. Il y travaillent actuellement. La FNAEM invite les distributeurs à faire de même auprès de leurs fournisseurs étrangers de literie et rembourrés.
- Dans l’attente de ces informations, la FNAEM conseille d’ores et déjà, par précaution et si possible, de conserver les codes-barres fabricants des literies et canapés vendus ou livrés depuis le 25 août et l’identité des clients ayant acheté ces produits.
- Pour les distributeurs important directement depuis des pays hors Union Européenne des literies, canapés et rembourrés, il convient de vérifier auprès de leurs fournisseurs concernés la présence dans ces produits de mousse fabriquée avec du TDI Lupranate T 80 A produit par BASF entre le 25 août et le 29 septembre 2017. En cas de réponse positive des fournisseurs, il est nécessaire de lister les clients consommateurs déjà livrés de ces produits et, si possible, différer les livraisons correspondantes jusqu’à connaissance des résultats des tests en cours.
Fin de la mise à jour
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Vendredi dernier, le 6 octobre, le géant de la chimie allemand BASF a indiqué à ses clients mousseurs (parmi lesquels Carpenter, Recticel…), via communiqué, que le processus de fabrication de ses mousses avait rencontré un « problème ». Problème survenu dans son site de Ludwigshafen, très récemment – depuis le 25 août jusqu’à fin septembre – qui serait plus précisément un dosage « non conforme avec ses critères de qualité » de DCB (dichlorobenzène) constaté dans le TDI, l’un des éléments entrant dans la composition du mélange permettant de fabriquer la mousse. Rapidement, dans la foulée, l’anomalie fut relayée par ces mousseurs auprès, notamment, des fabricants de matelas et de sièges rembourrés (d’autres secteurs sont impactés, comme celui de l’automobile), qui ont immédiatement pris la décision de stopper tout ou partie des lignes de production concernées.
Un communiqué officiel attendu
A ce jour, mercredi 11 octobre, le groupe allemand déclare être en phase de tests, et descendre la chaîne de ses clients mousseurs et industriels, afin d’évaluer le degré de nocivité potentiel des produits. Des explications fournies non pas par le siège allemand, mais, en ce qui concerne l’Hexagone, par Marc Petat, directeur du développement durable au sein de la filiale France, cité par Le Parisien et L’Est Eclair (les deux titres de presse locale suivent en effet de près l’actualité des sites Adova de Mantes-la-Jolie, Limay et Bar-sur-Aube, qui se sont donc vu contraindre d’interrompre temporairement leur production) : « Certains industriels, qui disposent d’une taille suffisante, font eux-mêmes leurs tests. Nous collaborons avec les autres pour les aider à répondre à cette question le plus vite possible » déclarait-il au quotidien de l’Est dans l’édition de ce jour, précisant par ailleurs que le groupe « [avait pris] des mesures quant au rapatriement [à ses frais] des mousses impures et au nettoyage des machines ». Le Spiegel allemand évoque par ailleurs la mise en place prochaine d’une hotline dédiée…
Mais cette attitude est aujourd’hui largement dénoncée par les acteurs du secteur de la literie, et plus largement du meuble, qui s’attendent toujours à recevoir une communication officielle émanant directement de la maison-mère : celle-ci devait arriver, selon nos informations, hier mardi ou aujourd’hui mercredi 11 octobre. L’unique déclaration venue d’Allemagne (celle de vendredi dernier) est en effet restée trop évasive à leurs yeux, et ils réclament en conséquence que BASF prenne ses responsabilités sur un sujet qui – même s’il n’y a aucunement lieu d’être alarmiste à l’heure qu’il est étant donné que les résultats des tests ne sont pas connus et que le porte-parole de BASF France veut écarter « a priori » un problème sanitaire et toute forme de « danger » – concerne néanmoins un élément potentiellement cancérigène… « Ils ne sont pas du tout réactifs sur la réalité des risques ni sur la conduite à tenir, nous confie un dirigeant du secteur. A notre échelle, on a même carrément l’impression qu’ils transfèrent leurs responsabilités ».
L’AF et la FNAEM sollicitent la DGCCRF et donnent leurs consignes
Dans cette attente, l’Ameublement Français et la FNAEM ont pris des mesures immédiates – une réunion « de crise » s’est tenue dès lundi après-midi dans les locaux du premier – afin de guider leurs adhérents fabricants et distributeurs sur la marche à suivre. Par précaution et conformément aux obligations légales, les deux organisations annoncent avoir sollicité l’avis de la DGCCRF et leur intention de « coopérer étroitement avec celle-ci pour sécuriser les consommateurs dans leur achat ». Les fabricants de matelas, de leur côté, sont invités à procéder à la traçabilité des produits : des composants éventuellement défectueux fabriqués depuis le 25 août peuvent évidemment se retrouver, aujourd’hui, dans leurs usines, au sein des magasins et même chez le client final… même si tout cela restera à déterminer précisément en temps réel, dans le cas où la nocivité serait effectivement avérée. La FNAEM, avec le concours de l’Ameublement Français, déclare ainsi avoir demandé aux fabricants de literie de « fournir aux distributeurs, le plus rapidement possible, la liste des produits susceptibles d’être concernés, avec leurs référence et leur date de livraison ». Et à compter de ce jour, mercredi 11 octobre, il est également conseillé aux magasins de « conserver les codes-barres fabricants attachés aux produits à livrer (pour les livraisons déjà programmées), et de noter le client livré correspondant, pour garantir la traçabilité ».
La fabrication reprend chez certains
Pour les fabricants, l’un des enjeux principaux est évidemment la reprise de la production afin de pouvoir approvisionner correctement leurs distributeurs, en écartant les risques pour leurs salariés et le consommateur final. Nous savons notamment, à ce jour, que les sites d’Adova devraient se remettre en marche « progressivement » à compter de demain, jeudi 12 octobre : les mousses défectueuses sont bien évidemment mises de côté, et des approvisionnements conformes ont pu être trouvés chez d’autres fournisseurs de composants pour cette matière, concurrents de BASF. Les clients distributeurs pourront ainsi être livrés, selon l’industriel, « dans les jours qui vont suivre ». De manière générale, les fabricants ayant relancé leur production informent, ou vont informer, directement leur clientèle en précisant les précautions prises et, le cas échéant, les délais de livraison supplémentaires découlant de l’interruption involontaire de leur production.
Et après ?
Reste maintenant, donc, à en savoir plus sur le degré de nocivité du composant incriminé, et de prendre les mesures qui s’imposent. Trop tôt, donc, pour évaluer l’impact que pourrait avoir cette affaire sur les ventes d’ici à la fin de l’année. Certains, toutefois, ne cachent pas leur inquiétude, se remémorant amèrement le « scandale » des sièges fabriqués en Chine survenu il y a quelque temps, qui avait pris de l’ampleur dès lors qu’il avait été dévoilé aux yeux du grand public… Concernant le problème actuel, le relais a déjà commencé à se faire, semblerait-il, en Allemagne. Ainsi, chaque heure compte.