Si les conditions sont réunies pour que le salon ait lieu – une décision devant être prise le 12 juin – Maison&Objet ouvrira ses portes du 4 au 8 septembre et fera une large place aux produits techniques destinés aux projets et au mobilier destiné aux espaces hybrides entre maison et bureau. Désigné designer de l’année, Franklin Azzi y apportera sa vision durable de l’architecture, et signera une animation événementielle dans l’espace thématique « Work ».
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Comme tous les salons de rentrée, la tenue de Maison&Objet en septembre, à Paris-Nord Villepinte, reste sujette à caution. C’est ce qu’a rappelé Philippe Brocart, le directeur général de la société organisatrice Safi, dans sa présentation du 13 mai dernier : « À l’heure où nous parlons, la tenue du salon n’est pas certaine, car deux inconnues demeurent : aura-t-on le droit d’organiser des manifestations de plus de 5000 personnes, et quelles seront les conditions de déplacement pour les visiteurs ? En attendant, nous nous préparons comme si le salon devait avoir lieu, une décision sera prise le 12 juin. » Si elle a bien lieu, cette édition sera placée sous le signe des projets d’architecture et d’aménagement, comme c’est le cas désormais pour les sessions de septembre. Dans ce cadre, parmi les quelque 3000 marques exposantes attendues, un nombre significatif d’entre elles relèvera d’une offre technique, avec des matériaux et des composants de second œuvre qui entrent dans la réalisation des aménagements et de l’architecture d’intérieur. Cette édition aura aussi une dimension de transversalité, puisque, comme le montre les mutations actuelles dans les espaces de vie, et notamment le développement du télétravail, tous ces composants sont de plus en plus susceptibles de trouver leur place aussi bien dans le résidentiel que dans les espaces tertiaires ou hôteliers. C’est la raison d’être du nouvel espace « Work », désormais installé pour les sessions de rentrée du salon.

(Copyright AE Thion)
Franklin Azzi, un architecte engagé
Pour accompagner ces mutations, le salon a désigné comme Designer de l’année un talent émergeant aux multiples facettes, Franklin Azzi. Né en 1975, il affiche un profil multiple d’architecte, mais aussi d’urbaniste, d’architecte d’intérieur auteur de nombreux projets de boutiques de créateurs dans le retail, mais aussi d’hôtels et restaurants, d’îlots multifonctionnels comprenant des espaces de logements, commerciaux et de loisir, sans oublier les réalisations de bâtiments tertiaires. A l’heure où la pandémie nous invite à repenser notre mode de consommation et notre mode de vie, Franklin Azzi affiche une polyvalence précieuse pour revoir notre façon de construire et d’habiter les lieux. « Nous devons aujourd’hui réfléchir différemment d’il y a six mois, explique-t-il, le volet environnemental, le recyclage et l’économie circulaire vont connaître un coup d’accélérateur. Nous devrons avoir de plus en plus de respect pour les bâtiments existants, les conserver au maximum et les utiliser comme un cadre pour exercer notre créativité en réduisant notre impact sur l’environnement. » À l’intérieur de cette profession de foi, l’architecte se détourne délibérément de tout effet de mode passager et consommateur éphémère de matériaux, pour privilégier la durabilité accompagnée d’une sorte de sobriété : les constructions devraient ainsi, selon lui « être garanties à vie ».

Franklin Azzi / ® Noel Manalili
De la Tour Montparnasse aux Beaux-Arts de Nantes
A la tête d’une agence parisienne qui emploie une cinquantaine de collaborateurs, Franklin Azzi peut déjà revendiquer bon nombre de projets d’envergure qui mettent en œuvre ces préceptes, comme celui de la réhabilitation de la Tour Montparnasse. « Ce bâtiment symbolise à lui seul les années « consommation », avec beaucoup de matériaux, et une consommation d’énergie élevée, explique-t-il. Tout l’exercice a consisté à le réhabiliter de façon vertueuse. » Pour rendre cette tour plus « aimable » aux yeux des parisiens, on a interrogé ses usages, par la création d’un centre de coworking, d’un hôtel, d’une serre, qui la transforment d’un espace de bureaux à un espace de vie. L’architecte a également signé la création de l’îlot Beaupassage dans le 7e arrondissement de Paris, qui associe des logements, des lieux de restauration, des points de vente, un club de gym… « Notre idée a été de conserver les bâtiments anciens, de comprendre le geste initial de l’architecte, et de s’en servir comme d’un marchepied pour développer le projet. Nous avons pour cela fait un diagnostic de l’existant, et adopté une attitude chirurgicale pour préserver les structures. Pendant longtemps, il a été plus cher de réhabiliter que de tout abattre pour construire en neuf, aujourd’hui la logique de la conservation et de l’économie de matériaux s’impose. » Dernier exemple parmi de nombreux autres, la création de l’École des Beaux-Arts de Nantes, dans les anciens bâtiments industriels où Alstom a longtemps fabriqué des hélices de bateaux. Ici encore, la charpente métallique de grande taille a été conservée, et a servi de structure pour accueillir des bâtiments « poupées russes » en béton dédiés à chaque discipline artistique, un chantier qui a fait appel, autre crédo de l’architecte, à des entreprises et fournisseurs locaux.

Visuels de l’espace Work (copyright AE Thion)
Une installation événementielle sur les espaces de travail
Reconduite par Maison&Objet pour la deuxième année à l’édition de septembre, la thématique « work » qui traite des nouveaux espaces de travail hybride, occupera une partie de l’immense hall 6. En plus des exposants de mobilier positionnés sur ce segment de marché, elle accueillera un cycle de conférences proposées par les observateurs et experts du secteur, et une installation qui a été confiée au designer de l’année Franklin Azzi. « Ce projet proposera une vision à 360 degrés de tout ce qui a été inventé en termes d’espaces de travail, explique l’intéressé. Pour respecter notre vision des choses, nous allons construire une structure minimaliste, avec peu de matériaux et donc peu de déchets à recycler, qui permettra de projeter sous forme d’images les générations de bureaux individuels ou collectifs. » Une installation qui remettra en perspective les évolutions actuelles, car « Nous sommes une génération d’hybridation, qui ne peut pas partir d’une feuille blanche, mais doit réécrire en utilisant le socle du passé. » Il reste à espérer que les circonstances seront réunies pour que le salon puisse écrire une nouvelle page de la sienne.
[François Salanne]