On nous annonçait « trois jours pour changer le monde » avec plus de 200 présentations de plus de 25 pays… En février, dans les espaces de la Défense, le Sommet du Design à Paris a tenu sa promesse, avec des échanges de grande qualité et le partage d’expériences pilotes sur la place du design dans les enjeux sociétaux et environnementaux actuels.
Et justement, sur ce point, soulignons qu’en pré-ouverture du Sommet, un atelier au VIA – encadré par le FCBA – détaillait les démarches en cours en France pour encadrer – pour le moment sur un principe volontariste – les entreprises à analyser leur cycle de production et à en informer le consommateur. Dans un second temps, les participants questionnaient en petits groupes le thème du « Mobilier durable, entre rationalité et émotion » sur le procédé du mapping d’idées. L’éco-organisme à but non lucratif Valdelia présentait, sur son stand, du mobilier fait avec des matières secondaires, réalisées dans un principe d’économie circulaire. Son président, Arnaud Humbert-Droz, expliquait : « Nous sommes des agitateurs d’écosystème. Depuis plus de dix ans, nous travaillons sur la mise en place de cette seconde vie des produits. Notre métier est de faire en sorte que l’on entre dans cette économie circulaire. Il est important que les designers s’impliquent, il faut qu’ils soient au centre de cette économie. »
Réflexions autour du métier de designer
Un autre volet de ce Sommet 2019 a consisté à mener des réflexions sur le métier et, plus largement, le rôle du designer, tout en gardant en fil conducteur les enjeux environnementaux… « La façon dont on parle du design aujourd’hui n’est pas la même qu’il y a dix ans et ne sera pas la même dans dix ans », a rappelé Alain Dufour, directeur de l’événement. Et les formations en sont le reflet : le réseau international Cumulus – qui rassemble de nombreuses écoles de design – a signé les accords de Kyoto dès les années 1990. Dès lors, comment entrer dans le mouvement ? Comment utiliser les méthodes de design pour une démarche durable ? La Sustainable Design School a été cofondée il y a cinq ans à Nice par Maurille Larivière, qui la dirige toujours : « Nous sommes davantage une école d’innovation qui utilise le design qu’une école de design. Dans le recrutement, on diversifie les cultures, les parcours, pour élargir les compétences et enrichir les méthodes créatives. » Le concept attire plus de quarante entreprises – et parmi elles de gros groupes – aujourd’hui partenaires pour des stages, des projets, voire des embauches. Elles sont aux aguets d’un nouveau positionnement, conscientes de ce que la démarche actuelle du design peut impliquer en matière d’engagement, donc d’image. « Notre enjeu, c’est de convaincre que le design n’est pas une étape d’un projet, mais doit être partout. La finalité est davantage l’usage que l’objet. Cela donne une autre résonance, exprimait Cécile Poujade, directrice chargée du retail et de l’international chez Saguez & Partners. Le design, c’est le fond et la forme. Il ne faut pas perdre de vue que la force du designer est sa créativité dans un monde d’uniformisation. » Tout en gardant, donc, en fil conducteur ces enjeux environnementaux, les conférences se rejoignaient sur le fait que le design a fortement évolué. Aujourd’hui, on travaille en mode collaboratif ; dans les projets, le marketing est embarqué comme l’utilisateur. Comme le disait Clément Bataille : « Nous travaillons en ‘‘intelligence collective”. Du design de produit, on est au design d’entreprise, on designe des business models, on travaille la transformation. »
Dans le dernier atelier, Anne-Marie Sargueil, directrice de l’Institut Français du Design, résumait : « Le design est dans la preuve : il tient les promesses de l’usage. La force des designers est de transposer des idées en éléments concrets. Il faut prendre l’environnement au sens large : leur rôle n’est pas de sauver la planète mais de répondre à des enjeux de société. En ce sens, le métier de designer sera un métier d’accompagnement du changement. »
[Nathalie Degardin]