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15.3.2022

[Chiffres marché du meuble] + 14,3 % en 2021 : rattrapage, mais pas que !

Le dernier exercice, pour le marché du meuble, aura été symbolique à plusieurs titres : déjà, par sa belle progression – elle est de + 14,3 % par rapport à 2020, et de + 8,8 % par rapport à 219 – mais, surtout, par le franchissement du seuil des 14 Mds€. L’ensemble des familles de produits et des circuits de distribution profitent de ces conditions, bien que des inégalités soient marquées. Des conditions qui semblent d’excellent augure au moins pour le moyen terme, d’autant que le « désir d’habitat » se montre profondément ancré dans l’esprit des Français, qui ont non seulement été freinés dans leur consommation depuis deux ans maintenant, mais se découvrent aussi de nouveaux besoins d’agencement et d’équipement… auxquels les acteurs savent répondre ! En revanche, si les indicateurs sont au vert, tout ne sera pas rose : la pression sur le pouvoir d’achat se fait toujours forte, certaines problématiques d’approvisionnement demeurent, et une grande « incertitude » générale – amplifiée par la situation internationale actuelle – plane toujours. Des paramètres à prendre en compte pour les prochains mois.    

Ce sont des chiffres que l’IPEA avait largement anticipés lors de son colloque de la mi-décembre dernier, lorsqu’il faisait alors état du cumul à fin octobre ; il faut croire, ainsi, que les mois de novembre et décembre n’ont pas généré d’ « accidents » puisqu’en effet, les prévisions étaient les bonnes… Sur l’exercice 2021, le marché du meuble a enregistré une progression de + 14,3 %, franchissant la barre des 14 Mds€ – pour la première fois ! – atteignant très précisément les 14,55 Mds€ (conformément au nouveau périmètre adopté, rappelons-le, en 2019). En comparaison avec la dernière année « normale » qu’est 2019, la variation demeure très louable, avec + 8,8 % et un gain, en valeur, de plus d’un milliard d’euros. Ce sont avec ces très bons chiffres que l’IPEA, entouré de la FNAEM et l’Ameublement français, a ainsi pu entamer son traditionnel bilan annuel, organisé ce mardi 15 mars en visioconférence à l’attention de la presse… « On a pu observer, en 2021, un phénomène de rattrapage après une année 2020 en retrait [- 4,8 % pour 12,73 Mds€, ndlr] suite à la crise sanitaire et à la fermeture des points de vente de produits non essentiels, souligne l’Institut. Mais le rattrapage d’une année difficile ne suffit pas à expliquer cette bonne performance. Les deux confinements de l’année 2020 ont remis le logement au centre de l’attention des ménages français, qui affichent de nombreux de projets de travaux et de réaménagement pour leur intérieur ». Et de résumer : « Les ventes de mobilier profitent pleinement, en 2021, de cette volonté de remise à neuf ». Une remise à neuf qui se fait volontiers par la montée en gamme, les consommateurs étant prêts à investir davantage dans leur équipement, désireux d’optimiser judicieusement leur intérieur face à leurs nouveaux besoins, et confortés par une certaine épargne amassée au fil des deux dernières années !

Cuisine leader, meublant bon dernier

Considérant cette belle progression globale, il est à noter que toutes les familles de produits y contribuent. A l’inverse de l’exercice 2020 où, une fois n’était pas coutume, le mobilier de jardin était le seul segment en croissance et la literie avait observé le recul le plus marqué, sur cette année 2021, tous les évolutions sont dans le vert, y compris si l’on dresse un comparatif avec 2019 [voir tableau correspondant].

> La cuisine reprend la tête du classement des progressions, avec + 19,5 % par rapport à 2020, représentant aujourd’hui 4,18 Mds€ soit 28,8 % du marché du meuble : en termes de « poids », elle se place ainsi au deuxième rang juste derrière le meublant. « [Justement, elle deviendra aussi peut-être leader] en valeur dans les mois qui viennent, l’écart avec le meublant n’ayant jamais été aussi bas, et sur des niveaux de croissance qui ne sont clairement pas en faveur de ce dernier » hypothèse l’IPEA [voir ci-après les données du meublant].

> Deuxième meilleure progression de 2021 : celle des canapés, fauteuils et banquettes, avec + 17,5 % et un marché de 2,61 Mds€ (17,9 % du marché du meuble). Un besoin de confort et de « coconning » replace cet élément au centre du salon, alors qu’il avait, auparavant, défavorablement subi la concurrence de l’écran plat : « Les ménages français sont à la recherche de confort pour leur logement et n’hésitent pas à investir et à monter en gamme, ce qui profite pleinement aux canapés et fauteuils » résume l’IPEA. Les enquêtes d’intentions d’achat, menées chaque mois par l’Institut au cours du second semestre 2021, plaçaient en effet, de manière systématique, le canapé en tête des projets concernant le mobilier… La banquette, en revanche, souffre beaucoup, comme cela est le cas depuis plusieurs années.  

> Le meuble de jardin poursuit sur une bonne lancée, avec + 14,5 % observés en 2021, avec des ventes évaluées à 650 M€ (soit 4,4 % du marché du meuble). Si cette famille est donc la troisième meilleure progression par rapport à 2020, elle remonte en première position si l’on compare avec 2019… Dans les deux cas, la raison de cette très belle évolution est simple : les ménages ont témoigné d’un attrait particulier pour leurs espaces extérieurs, alors que les restrictions de déplacement sévissaient de nouveau au premier semestre 2021, comme cela avait été le cas en 2020.

> Avec + 12,8 %, la literie (qui, souvenons-nous, avait enregistré le repli le plus marqué au cours de l’exercice précédent), se trouve à la quatrième place en termes d’évolution cette année, représentant 1,86 Md€ soit 12,8 % du marché du meuble. « Si la croissance est au rendez-vous, cette catégorie marque néanmoins le pas, et ne se présente plus comme l’un des moteurs du marché, comme cela fut le cas tout au long des années 2010 » commente l’IPEA, qui souligne par ailleurs que la comparaison sur deux ans (référence 2019, donc) place même cette famille – si l’on exclut le très éprouvé meublant – au dernier rang des progressions, avec seulement + 4,5 %. Cette variation apparaît d’autant plus faible que de nombreux indicateurs vont pourtant dans le sens d’une augmentation du panier moyen (hausse des prix, développement des ventes grandes tailles, etc.)

> De leur côté, les meubles de salle de bains affichent + 10,5 % par rapport à 2020, avec des ventes de 550 M€ (3,8 % du marché). Evidemment, ces derniers profitent du réaménagement global de la maison souhaité par les ménages… mais se trouvent très « dilués » dans le projet global pensé pour cette pièce, qui se concentre sur beaucoup d’autres éléments (robinetterie, céramiques, revêtements, etc.) « On notera également que la salle de bains est le marché du meuble le plus corrélé aux mises en chantier de logements neufs, [donc] la reprise timide de l’immobilier […] n’aura pas non plus favorisé les bonnes performances du segment » ajoute l’IPEA.

> Enfin, comme cela est souvent le cas ces dernières années, le secteur du meublant affiche donc la plus faible évolution, même si celle-ci atteint + 9,3 % par rapport à 2020 (pour 4,70 Mds€ au total, soit 32,3 % du marché du meuble global ce qui, en poids valeur, en fait encore la première catégorie devant la cuisine). Comment expliquer cela ? Selon l’IPEA, les arbitrages des Français se sont faits au détriment de cette catégorie, et ce même si le dressing ou le bureau, par exemple, impulsés par le développement du télétravail, sont sortis du lot… En prenant 2019 comme année de comparaison, le meublant est, là aussi, la catégorie qui enregistre la plus petite progression (+ 2,4 %).

Evolution par circuits de distribution du meuble – 2021 – IPEA / Eco-mobilier / INSEE

Spécialistes et milieu / haut-de-gamme pèsent toujours plus

Concernant les circuits de distribution, si l’exercice 2020 avait été très particulier – plaçant fatalement l’e-commerce comme grand gagnant des progressions, suivi des GSB qui, elles aussi, avaient été dans le vert – 2021 a permis à chacun de retrouver des couleurs, autrement dit une évolution positive. Les deux plus belles croissances ont été celles des circuits spécialistes, en témoigne le classement dressé par l’IPEA [voir tableau] :

> Ce sont les « spécialistes » (catégorie renfermant, comme l’a définie l’Institut, tous types de magasins spécialisés sur les différentes familles de produits) qui affichent la plus belle croissance par rapport à 2020, avec + 24,6 %. Ils représentent désormais 26,7 % du marché, avec un chiffre d’affaires de 3,88 Mds€ TTC. Par rapport à 2019, la variation est également très belle : + 22,2 % ! « Les ménages français ont l’envie d’investir dans leur logement, et leur volonté de monter en gamme continue de se manifester, en témoignent ces progressions importantes » analyse l’IPEA. Tous les spécialistes contribuent à ce dynamisme, mais les salonistes et cuisinistes se démarquent particulièrement : si de telles conditions sont souvent observées chez les seconds, cela est en revanche un peu moins ordinaire chez les premiers qui, ainsi, peuvent « reprendre un peu d’oxygène après plusieurs exercices délicats ».

> Deuxième circuit observant la plus belle progression en 2021 : celui de l’ameublement milieu / haut-de-gamme (magasins de centrales, généralistes indépendants, réseaux haut-de-gamme), avec + 18,9 % pour un CA atteignant 1,63 Md€ TTC (soit 11,2 % du marché). Là encore, la montée en gamme des consommateurs est un grand bénéfice pour ces revendeurs… « Et cela se traduit d’ailleurs par de plus fortes progressions chez les enseignes de l’ameublement haut-de-gamme par rapport au milieu-de-gamme » précise l’Institut, constatant ainsi que, suite à ces bons résultats de 2021, « l’envie des ménages d’investir dans des produits plus qualitatifs perdure dans le temps, et n’aura pas juste été un effet transitoire lié à la fin du premier confinement en mai 2020 ».

> Elles avaient été l’un des deux circuits positifs en 2020, juste derrière l’e-commerce : les Grandes Surfaces de Bricolage sont, en 2021, au troisième rang des progressions avec + 14,1 % (2,03 Mds€ de CA TTC, représentant 13,9 % du marché). Par rapport à 2019, la progression est également remarquable, avec + 17,3 %. Au sein de ces magasins, le rayon mobilier se fait toujours plus étoffé, inclus dans les solutions globales de réaménagement qui y sont proposées… Les meilleures progressions s’observent sur le mobilier de jardin ; les GSB demeurent également leader du marché sur les ventes de meubles de salle de bains (en générant près de la moitié des ventes totales, en valeur, de cette famille de produits), et témoignent d’un beau dynamisme dans la cuisine, dont l’offre monte toujours plus en gamme ! L’IPEA fait aussi remarquer que, « côté meublant, le dressing y a toujours le vent en poupe. »

> Regroupant les magasins non spécialisés meubles (dont grandes surfaces alimentaires, discounters et autres), les autres circuits ont augmenté leur CA de + 8,8 % en 2021, représentant aujourd’hui, avec 620 M€, soit 4,2 % du marché. Au sein de cela, l’Institut fait remarquer, entre autres, que les GSA ont su renforcer, en 2021, leur offre mobilier globale avec du jardin ou de la literie, ce qui a contribué à leur dynamique…

> Ce n’est pas, cette année, au dernier rang des progressions que figure la Grande Distribution Ameublement, mais à l’avant-dernier, juste avant l’e-commerce : avec un CA de 5,29 Mds€ TTC, en hausse de « seulement » + 8,6 % en 2021, elles composent aujourd’hui 36,4 % du marché… alors que cette part était encore à 40,6 % en 2019. Il est à noter, d’ailleurs, qu’en comparant 2021 à 2019, ce circuit de la GDA est le seul à observer un repli de son activité (– 2,7 %). « Concernant l’année dernière, ces enseignes auraient pu difficilement faire mieux » admet l’IPEA, en rappelant les nouvelles fermetures de magasins imposées au premier semestre – sur une durée cumulée de plus de trois mois – mais aussi les problèmes d’approvisionnement et de stocks qui ont pu inciter les consommateurs à se tourner vers d’autres enseignes… « En outre, des acteurs importants du circuit ont fermé de nombreux points de vente au cours de l’année 2020 » précise l’Institut qui, au vu de tous ces bouleversements, estime ainsi que le recul de – 2,7 % sur la période 2019 – 2021 n’est finalement « pas forcément une mauvaise performance ».    

> Enfin, rappelons-nous que l’e-commerce (pure players vendant du mobilier) avait très logiquement tiré son épingle du jeu en 2020, en affichant la plus belle croissance. En 2021, il continue de développer son CA, mais de façon moindre que la vente physique : + 7,1 % de hausse, atteignant 1,10 Md€, soit 7,6 % du marché du meuble. Ces derniers mois, les magasins physiques ont en effet eu l’occasion, de manière très réactive, d’optimiser leur omnicanalité, en dévoilant des services aboutis et de très belles solutions en matière de conception de projet, inspiration, communication, mais aussi livraison, etc… devenant ainsi une concurrence accrue pour les pure players ! « Ce déficit de performances par rapport aux enseignes de la vente physique illustre également le fait que, lorsqu’il a le choix pour ses achats de mobilier ou d’équipement de la maison, le consommateur continue de privilégier le magasin […] » souligne l’IPEA, évoquant aussi l’impact, sur ce circuit Internet, des problèmes de stock.

Le meuble saisit les opportunités !

Si de telles performances ont pu être réalisées au cours des mois ayant suivi les débuts de la crise sanitaire, il y a maintenant deux ans, cela est bien, effectivement, parce que le secteur du meuble a su très vite saisir les opportunités qui s’offraient à lui, tout en déjouant des écueils de taille : saluons, par exemple, la très forte capacité d’adaptation, évoquée plus haut, qu’ont démontrée les  enseignes physiques face à la fermeture imposée de leurs magasins… Capacité d’adaptation, également, en termes d’innovations produits et services, afin de répondre aux nouveaux besoins exprimés par les consommateurs et de les aider au mieux à mener à bien leur projet : nous évoquons par là les offres enrichies de mobilier modulable ou sur-mesure (à l’image d’enseignes cuisinistes devenues agenceurs d’intérieur, ou d’un Gautier ayant investi 12 M€ dans sa ligne « Batch One », s’ouvrant ainsi les marchés de l’agencement et de la prescription – voir CM&H n° 2893, daté du 4 février dernier). Il s’agit également de l’optimisation du parcours client avec des solutions de pointe (outils « 3D Studio » chez Roche Bobois, visite virtuelle d’un magasin BoConcept, et l’ensemble des configurateurs, logiciels et autres solutions d’aide à la vente…). Citons, enfin, les synergies issues de rapprochements entre commerce physique et pure players, les études approfondies des parcours clients en ligne (Leroy Merlin Source, Ikea Life at Home) visant à mieux cerner les besoins et, de manière beaucoup plus générale, les efforts considérables déployés pour renforcer le rôle de conseil et d’ « inspirateur » des magasins. Dernière capacité d’adaptation – constituant autant d’opportunités ! – et non des moindres : la prise en compte de la dimension « développement durable » à l’importance croissante, avec une fabrication et une distribution se faisant toujours plus responsables.

Le « désir d’habitat » se montre profondément ancré dans l’esprit des Français, avec des intentions d’achats toujours bien orientées ! (c) Zuiver

Perspectives, prévisions

Si cette grande capacité d’adaptation, et les nombreuses opportunités que le secteur a donc su saisir, ainsi que les envies des consommateurs en matière d’habitat semblent prometteuses pour l’avenir [des points largement évoqués dans le compte-rendu du colloque IPEA 2021 évoqué plus haut], il demeure de grandes incertitudes, auxquelles s’ajoutent, depuis peu, celles générées par le dramatique conflit qui sévit actuellement entre la Russie et l’Ukraine : inflation (des éléments auxquels l’immobilier, dont dépend grandement le meuble, est également soumis), problématiques d’approvisionnements plus ou moins persistantes, échéances politiques… Des bouleversements internes au secteur sont également attendus, comme les conséquences – notamment en termes de maillage – du rapprochement But / Conforama, ou encore l’avenir du fabricant Demeyere… Ainsi, les mois à venir s’annoncent denses, mais la profession et particulièrement les industriels, comme l’ont appuyé les différents interlocuteurs de cette conférence du 15 mars, font preuve d’une adaptation de chaque jour au sein de cette actualité chargée.

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[Zoom]

Janvier 2022 en léger recul

Les premières données de l’exercice en cours ont été livrées par l’IPEA il y a peu, avec les chiffres du mois de janvier. Celui-ci marque un repli de – 1,3 % par rapport à janvier 2021, ce qui reste, selon l’Institut, « mesuré ». En comparaison avec 2019 – toujours dans l’optique de prendre la dernière année « normale » pour référence – l’évolution est, cette fois, franchement positive : + 8,2 %. « La situation est très hétérogène selon les enseignes, et les reculs d’activité assez marqués côtoient de belles progressions de la part de certains acteurs du marché » précise l’IPEA.

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