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27.1.2023

[Baromètre M&O] Hausse du prix de l’énergie : quelles conséquences pour notre secteur ?

La hausse du prix de l’énergie occupe une place importante dans l’actualité de ce début 2023. Mais quel peut être son impact sur l’activité des acteurs du meuble et de la décoration ? Pour son cinquième Baromètre Maison&Objet, le salon a eu la bonne idée de poser la question à sa communauté de distributeurs, marques et prescripteurs, qui se disent dans leur immense majorité impactés, et ont déjà pris un train de mesures pour réduire la facture.

Après un exercice 2021 record pour le secteur de la maison, l’exercice 2022 à peine clos a été marqué par un ralentissement du marché, surtout au second semestre, prévisible après une telle période de surchauffe, sous l’effet notamment de la baisse du pouvoir d’achat des Français, consécutive à la hausse des prix, en particulier de l’énergie. Si le consommateur final fait désormais plus attention au moment de remplir le réservoir de son véhicule, s’il a tendance à baisser d’un ou deux degrés le chauffage pour maîtriser sa facture énergétique, les professionnels du meuble et de la décoration sont eux aussi impactés. Mais dans quelles proportions ? Avec quelles incidences sur leur activité ? C’est le thème qui a été retenu par le cinquième Baromètre Maison&Objet, dont le principe est d’interroger trois fois par an, au sein de la communauté du salon, un échantillon représentatif de ses trois cibles principales, les distributeurs (boutiques indépendantes, enseignes, grands magasins, e-commerce…), les marques (fabricants, éditeurs, designers…), et les prescripteurs (architectes, architectes d’intérieur, promoteurs…). Pour cette nouvelle mouture, 810 de ces professionnels ont été interrogés, français et internationaux – 409 distributeurs, 109 marques, et 292 prescripteurs – via un questionnaire en ligne administré du 3 au 12 octobre dernier, ce qui a permis de recueillir chiffres et tendances, consultables en ligne sur le site internet du salon.


Source : Maison&Objet, Baromètre 5

Un impact quasiment unanime et multiforme

Le premier constat réalisé par le Baromètre est que la quasi-totalité des professionnels se disent impactés par la hausse du prix de l’énergie : 45 % des distributeurs, 42 % des marques, et 38 % des prescripteurs se disent « fortement affectés » par cette situation. Si on met tous ces profils ensemble, 42 % sont fortement impactés, 40 % le sont modérément, et 15 % faiblement, ce qui donne un total de 97 % de professionnels affectés plus ou moins sérieusement. En détaillant par type d’énergie, c’est le prix de l’électricité qui les impacte le plus (76 %), suivi des carburants (55 %) et du gaz (29 %). Mais cet impact se traduit aussi dans le comportement de leurs clients, puisque 83 % des personnes interrogées, constatent qu’ils achètent moins : 47 % constatent une baisse du panier moyen, et 40 % une augmentation du nombre de clients qui entrent sans rien acheter. Les ventes se font plus difficilement : les distributeurs estiment que les clients désormais prennent leur temps pour comparer avant de se décider. En résumé, les distributeurs constatent que les clients « se déplacent moins », et certains avancent qu’ils passent moins de temps dans leur résidence secondaire pour ne pas avoir à la chauffer. Les marques interrogées relèvent que « la part croissante de l’énergie dans le budget des ménages dégrade leur moral et les amènent à y regarder à deux fois avant d’acheter. » De leur côté, les prescripteurs sont 75 % à constater un changement de comportement de leurs clients ou prospects, et subissent l’impact de la hausse des prix de l’énergie sur le coût de la construction. En conséquence, 68 % voient une réduction des budgets des chantiers, et 63 % un allongement des délais de décision de leurs clients. « Même sans augmenter nos tarifs, le coût global des travaux devient un véritable frein pour l’exercice de notre profession », déclare une architecte d’intérieur.

Source : Maison&Objet, Baromètre 5

Économies d’énergies : les magasins réagissent

Pour faire face à cette situation, 68 % des entreprises interrogées déclarent qu’elles ont déjà pris des mesures pour réduire l’impact de leur facture énergétique. Pour les distributeurs, cela se traduit par la fin de l’éclairage des vitrines après la fermeture, mais aussi parfois par un aménagement des horaires d’ouverture. « Mon magasin est situé dans une galerie commerciale, où la fréquentation est nulle à partir de 19 heures. Je ferme donc une heure plus tôt, car il est inutile de rester ouvert jusqu’à 20 h ; en revanche gagner une heure par jour permettra d’économiser réellement de l’énergie », argumente un dirigeant de magasin. Certains distributeurs ont carrément décidé de faire l’impasse cette année sur la décoration de Noël, très énergivore. Autre moyen d’économiser l’énergie, les ampoules traditionnelles sont de plus en plus remplacées par des LEDs plus sobres. Certains distributeurs franchissent le pas d’investir dans la rénovation énergétique de leur bâtiment, en changeant les fenêtres pour des plus isolantes, en supprimant les verrières qui sont des passoires thermiques en hiver, et des étuves en été qui exigent de la climatisation. La tendance est aussi aux énergies renouvelables, panneaux solaires photovoltaïques en tête, et à l’installation de système de gestion automatique du chauffage et de l’éclairage en fonction des présences humaines dans le point de vente. En résumé, les distributeurs s’attendent à un coût élevé de l’énergie pour longtemps, et s’organisent en conséquence.

Source : Maison&Objet, Baromètre 5

Adapter l’activité et les déplacements

Presque tous les professionnels interrogés déclarent aussi qu’ils ont réduit le chauffage à l’intérieur de leurs locaux – à 19, 18, 17 degrés ? – conformément aux recommandations des pouvoirs publics, et il y a fort à parier qu’ils seront aussi plus regardants sur la climatisation l’été prochain. Du côté des marques, 41 % d’entre elles déclarent qu’elles ont été amenées à fabriquer à la commande, elles sont 17 % à avoir revu les horaires de leurs équipes de production, et même 6 % à affirmer qu’ils ont arrêté les productions trop énergivores.

Les fabricants et les distributeurs sont 36 % à optimiser les transports, ce qui vaut pour les marchandises, par un meilleur remplissage des camions, et pour les salariés aussi : les déplacements physiques sont réduits à l’indispensable, et l’habitude prise de réunions à distance en visioconférence pendant la pandémie reprend du service.  « J’essaye au mieux de regrouper les achats en une seule fois, mais ce n’est pas toujours évident », témoigne un distributeur français. Le prix élevé de l’énergie pousse en définitive à rationnaliser son activité, et à faire une nouvelle « chasse au gaspi » : « Je planifie mon emploi du temps différemment, je reste dans les cafés lorsque j’ai des rendez-vous le matin et en fin d’après-midi, ce qui m’évite de faire des allers-retours en voiture », relate un architecte d’intérieur.

Lire aussi : Prix de l’énergie : toujours vigilante, la CNEF appelle à de nouvelles mesures fortes

Répercuter la hausse de l’énergie sur les tarifs ?

Pour absorber l’augmentation des prix de l’énergie, la solution la plus simple semble de la répercuter sur ces prix de vente, comme l’ont déjà fait de nombreux fabricants et distributeurs en 2022. Mais, comme nous l’apprend le baromètre, les avis sont différents selon les cibles du salon : cette solution est envisagée par 53 % des distributeurs, 61 % des marques et 52 % des prescripteurs. Car cette pratique n’est pas sans risque : 9 professionnels interrogés sur 10 estiment qu’une telle répercussion entraînerait pour eux une baisse du volume de leurs ventes. Cet impact serait fort pour 39 % d’entre eux tous profils confondus – et même pour 44 % des distributeurs – et modéré pour 37 % d’entre eux. 7 % des sondés – et 15 % des marques – déclarent qu’ils se savent pas quel serait l’impact d’une telle répercussion sur leur activité, ce qui ajoute un degré de plus d’incertitude. Pour maîtriser ce risque, l’attitude des acteurs du marché pourrait être de répercuter une partie seulement de la hausse des prix de l’énergie, et de faire parallèlement une « chasse aux coûts » non indispensables, afin de préserver la profitabilité de leur activité. Ce cinquième Baromètre Maison&Objet conclut sur une note optimiste, en indiquant que cette réduction à marche forcée des consommations énergétiques, des déplacements et des transports oriente déjà les entreprises vers une forme de sobriété qui aura un impact positif sur leur bilan carbone et dans la lutte contre le changement climatique. Le rendez-vous est déjà pris pour une nouvelle édition en février 2023.

[F. S.]

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[Zoom]

Les principaux indicateurs orientés à la baisse

Pour la première fois depuis le lancement du Baromètre, les principaux indicateurs traduisent un ralentissement du marché. Ainsi, l’évolution du chiffre d’affaires, sur les quatre derniers mois précédant octobre 2022 versus la même période un an plus tôt, est à la baisse pour 45 % des entreprises interrogées (et même 52 % des distributeurs, un chiffre en hausse de 16 %), étale pour 38 % d’entre elles (+ 7 %), et en hausse pour 17 % seulement d’entre elles (- 25 %). De même, les perspectives de chiffre d’affaires sont en net recul à 34 % négatives (un chiffre en hausse de 26 %), à 48 % neutres (+ 16 %), et à 18 % seulement positives (- 43 %).

Ainsi, 54 % des distributeurs ont l’intention de commander moins contre 33 % qui ont l’intention de commander plus, sur les quatre mois qui suivent octobre 2022. Des chiffres qui se sont nettement dégradés par rapport à ceux de juin 2022, quand 40 % avaient l’intention de commander plus et 40 % de commander moins. D’autre part, 36 % des distributeurs font état des stocks élevés (contre 33 % en juin 2022), 47 % font état d’un niveau de stock normal (contre 49 % en juin 2022), et 16 % d’un niveau de stock bas (contre 18 % en juin 2022).

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