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9.3.2022

REP : la responsabilité élargie d’Eco-mobilier

Dans le cadre d’un webinaire organisé le 8 février dernier, les sociétés Re(Set) et SGS sont revenues sur la logique des filières REP (Responsabilité élargie des Producteurs), qui impacte l’activité des fabricants et des distributeurs, et sur les nouveautés de la loi Anti-gaspillage (AGEC) concernant les REP. Une occasion pour Dominique Mignon, présidente d’Éco-mobilier, de détailler les mesures d’accompagnement mises en place par l’éco-organisme qui, en plus des déchets d’ameublement, est également en charge des gisements des produits de décoration, et depuis 2022 de ceux du Jouet et du Brico-Jardin, ce qui laisse entrevoir des synergies au profit des adhérents de ces différentes filières REP.

Comment donner de la visibilité aux entreprises sur la situation actuelle des REP (Responsabilité Élargie des Producteurs) et les changements à venir avec la loi AGEC ? Tel était le défi relevé conjointement par la société Re(Set) et le cabinet SGS, dans un webinaire organisé le 8 février dernier sur le thème « La REP, pourquoi est-ce si compliqué ? » [voir encadré]. « Les entreprises doivent relever le défi de la transition énergétique de façon holistique, en réfléchissant à la fois industrie, matériaux, investissement et marketing, pour traduire les nouvelles exigences réglementaires en opportunité de business, a expliqué Géraldine Poivert, présidente et cofondatrice de Re(Set) Compagnie. C’est un sujet qui peut paraître complexe, mais les entreprises ont tout à gagner à jouer la carte de l’économie circulaire, qui est finalement une gestion de la ressource rare. » Être proactif dans cette démarche, en effet, est un facteur de fidélisation des clients, d’amélioration de l’offre, et de sécurisation des approvisionnements, avec à la clé une pérennisation des activités.

De la collecte à l’éco-conception

Directrice de la Business Unit Hardlines chez SGS, Hélène Largement est revenue sur le principe de la REP et ses évolutions en cours. « Avant l’arrivée des REP, la collecte des déchets était assurée – de façon imparfaite – par les collectivités et financée par l’impôt. Avec la REP, c’est désormais le producteur qui paie une quote-part à l’éco-organisme pour financer la collecte et le recyclage ou la valorisation des déchets. Responsable de l’impact de son activité sur l’environnement, le producteur intègre le coût du recyclage de ses produits en fin de vie, sous la forme de l’éco-contribution qui est payée par le consommateur final. » Ce schéma, qui est opérationnel dans l’ameublement depuis 2013 avec Éco-Mobilier pour le mobilier domestique [voir plus loin], génère aussitôt un « coup d’après » : « Étant donné que le coût de recyclage est inclus dans le prix de vente, le producteur a donc tout intérêt à fabriquer le produit le plus vertueux possible, celui qui coûtera le moins cher à recycler, à valoriser, ou pour lui donner une seconde vie, continue l’intervenante. La REP est donc un levier puissant vers l’éco-conception, et vers les matériaux les plus vertueux qui permettent de recréer de la ressource dans le cadre de l’économie circulaire. » Voilà pourquoi Eco-mobilier est aujourd’hui un acteur de l’éco-conception, notamment par l’organisation de ses Innovations Days, qui mettent en relation les fournisseurs de matériaux innovants et bons pour la planète, et les fabricants de mobilier qui sont en quête d’un « verdissement » de leurs produits. L’éco-organisme est également engagé dans la mise en place de filières de recyclage, qui puissent mettre à leur disposition, en quantité industrielle, des matériaux vertueux qui leur permettent de réduire l’impact de leurs produits.

Dominique Mignon Eco-mobilier – le courrier du meuble et de lhabitat

Loi AGEC : des exigences nouvelles

La contribution majeure de ce webinaire est d’offrir un point sur les nouveautés apportées par la loi Anti-gaspillage et économie circulaire – dite loi AGEC – de février 2020 aux différentes REP, qui sont organisées, rappelons-le, par filières. Après celle de l’ameublement, mise en place en 2011 et opérationnelle depuis 2013, la nouvelle loi instaure la création de 11 nouvelles filières REP, dont celles du secteur des jouets et des articles de bricolage et de jardinage dès 2022 (prises en charge par Éco-mobilier, voir plus loin), et celle des produits ou matériaux de construction du Bâtiment en 2023. Cette loi marque donc une extension des REP à de plus en plus de filières, et crée de nouveaux mécanismes qui impactent les « producteurs ». En premier lieu, elle instaure une modulation des éco-contributions sous la forme de bonus & malus en fonction des performances environnementales des produits, ce qui est une incitation supplémentaire à l’éco-conception, et renforce le rôle des éco-organismes en la matière. Deuxièmement, elle impose le principe de la reprise sans frais des produits usagés de même nature, pour les producteurs, afin de faciliter et d’augmenter le taux de collecte. Troisième changement important, les producteurs ont obligation d’informer efficacement le consommateur sur les modalités de tri, une mesure accompagnée par des pénalités financières en cas de logos qui créent la confusion. Enfin, la loi crée un fonds dédié au réemploi et à la réparation : 5 % des éco-contributions seront dédiés au réemploi, via les acteurs de l’économie sociale et solidaire, et ce fonds servira au financement des infrastructures de réparation, pour favoriser l’allongement de la durée de vie au détriment du remplacement des produits.

Éco-mobilier : accompagner la collecte par les producteurs

Les propos précédents, valables pour l’ensemble des REP, ont été complétés par l’intervention de la présidente d’Éco-mobilier, Dominique Mignon, qui a dressé un bilan des 10 ans d’activités de la REP Ameublement, l’une des premières mises en place dans le temps, juste après celle des emballages. Elle a ainsi déclaré que l’éco-organisme a collecté, pour 2021, 1,2 million de tonnes de produits usagés – auxquelles s’ajoutent 300 000 tonnes collectées par les collectivités, soit un total de 1,5 million de tonnes – dont 51 % sont recyclés et même 6 % affectés au réemploi, en étant soit vendus d’occasion, soit donnés, soit upcyclés pour une deuxième vie. Le taux de valorisation est de 93 %, l’objectif « zéro déchet » étant fixé à 2023. Les produits collectés sont majoritairement du bois et des matériaux dérivés du bois – panneaux de particules, MDF… – mais aussi des mousses issues des produits rembourrés comme les matelas et canapés, les tissus qui les entourent, sans oublier du plastique et du métal. L’une des particularités d’Éco-mobilier, c’est que 80 % de ses 6 200 adhérents sont des distributeurs et des places de marché, aussi bien spécialistes, multi-spécialistes, enseignes de e-commerce, etc., les autres 20 % étant des fabricants.

Pour répondre aux nouvelles exigences de la loi AGEC, l’éco-organisme a bâti une stratégie qui vise à faciliter la vie de ses adhérents distributeurs et de leurs clients. « L’une des grandes nouveautés de la loi est l’obligation, pour les distributeurs et pour toutes les filières REP, de reprendre sans frais les produits usagés sur les points de vente en magasin ou sur les points de livraison en e-commerce, explique-t-elle. C’est une révolution pour les distributeurs ! Notre nouveau défi est de leur proposer une solution globale de reprise, sur les points de vente, du mobilier, des jeux de plein air, des jouets, des articles de bricolage et de jardin, et bientôt des matériaux de construction, avec une filière de recyclage pour chacun des matériaux concernés, en indemnisant nos adhérents pour les coûts de collecte associés. Il faudra des points de collecte partout en France, qui ne seront pas forcément des déchetteries publiques, en équipant les points de vente pour les particuliers, et en trouvant des solutions pour les clients artisans, c’est un très grand enjeu pour nos distributeurs. » Pour un recyclage efficace, ces points de collecte devront aussi mettre l’accent sur le tri à la source, qui est la base de départ qui conditionne l’efficacité de tout le processus.

L’enjeu de la massification

C’est aussi la raison pour laquelle Éco-mobilier, après avoir intégré la collecte et le recyclage des textiles de décoration (couettes, rideaux…) a obtenu d’être d’éco-organisme dédié pour la filière REP Jouets (100 000 tonnes, avec une dominante plastique), et Brico-Jardin (100 000 tonnes de plastique, bois et métal) : ces filières en effet génèrent des déchets qui ont des matériaux en commun – bois, plastiques, métal… – ce qui permettra de massifier les déchets, et de déclencher les investissements nécessaires pour offrir aux adhérents les solutions de recyclage les plus efficaces et les plus économiques, et de croiser les gisements. Une mutualisation qui permettra par exemple d’offrir aux fabricants de jouets du bois ou du plastique issu du recyclage de la filière REP du meuble, ou inversement. En augmentant les volumes de matières recyclées remises sur le marché, avec possibilité de les normaliser, et de combustible issu de la valorisation des déchets, l’éco-organisme permettra de se rapprocher un peu plus de son objectif « zéro défaut », tout en participant à la préservation des ressources naturelles.

[F. S.]

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[Zooms]

Re(Set) et SGS : un programme de webinaires sur l’économie circulaire

Les sociétés Re(Set), cabinet de conseil spécialisé dans la transition environnementale, et SGS, l’un des leaders du testing, de l’inspection et de la certification, unissent leurs expertises pour offrir aux entreprises des rendez-vous en ligne sous forme de webinaires pour les accompagner sur le chemin de l’économie circulaire. Après « La REP, pourquoi est-ce si compliqué ? » le 8 février, le thème traité devait être « Bien s’approvisionner, bien produire, bien évaluer les produits : focus sur l’ACV » le 22 février. Le programme se poursuivra avec les thèmes « L’emballage, enjeux et opportunités », « Nouveaux packaging : substitution au plastique, chimie et enjeux sanitaires », « La seconde main pour les produits de l’enfance – enjeux et opportunités, ou encore « Vers des meubles plus durables ? ».

Les principales dispositions de la loi AGEC pour les filières REP

> 11 nouvelles filières REP, dont celles des jouets, des articles de bricolage et de jardinage dès 2022, attribuées à Éco-Mobilier, et celle des produits ou matériaux de construction du Bâtiment en 2023

> Modulation des éco-contributions sous la forme de bonus & malus en fonction des performances environnementales des produits

> Obligation de reprise sans frais des produits usagés de même nature, pour les producteurs, afin de faciliter et d’augmenter le taux de collecte

> Obligation d’informer efficacement le consommateur sur les modalités de tri, pénalités financières en cas de logos qui créent la confusion

> Création d’un fonds dédié au réemploi et à la réparation, à hauteur de 5 % des éco-contributions

Un mécanisme de lutte contre les « free-riders »

La loi AGEC renforce aussi le cadre d’application des REP, avec un élargissement des profils de « producteurs » concernés. Ainsi, les plateformes de e-commerce ou « market places », qui se développent et prennent de plus en plus d’importance, devront elles aussi remplir des obligations en matière de REP : ce sont les vendeurs qui sont présents sur ces plateformes qui doivent se déclarer et se conformer aux exigences des REP mais, dans le cas où ils ne le feraient pas, il revient à la plateforme d’entreprendre ces démarches pour eux. Cette disposition a pour but de lutter contre les « free-riders » – les contrevenants en bon français – qui sont des passagers clandestins, puisqu’ils n’adhèrent pas aux éco-organismes, et vendent des produits sans s’acquitter de leur obligation de percevoir et de reverser l’éco-contribution. Le loi AGEC prévoit d’ailleurs la mise en place de mécanismes de sanctions, autrement dit des amendes, pour ces « free-riders », passant ainsi d’une obligation de moyens à une obligation de résultat.

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